Inspiré d'une histoire réelle, Sergent Major Eismayer s'inscrit parfaitement dans la mouvance d'un cinéma autrichien qui se caractérise par une certaine radicalité et, souvent, une froideur qui fouette les sangs. Le ton rude du film de David Wagner, qui ne cherche cependant pas la provocation, ce qui a pu être reproché à ses compatriotes Haneke, Seidl ou Haussner, convient parfaitement au milieu qui y est décrit, celui de l'armée, où l'excès de testostérone semble une constante pour inspirer du respect aux autres, d'autant plus quand on occupe un poste hiérarchique important. La romance amoureuse gay y est donc a priori proscrite, plus que dans tout autre milieu professionnel. Le film interroge le concept de virilité mais montre surtout deux façons de vivre son homosexualité, soit dans la clandestinité et la honte, soit en l'assumant sans complexes et en affrontant résolument le regard d'autrui. La leçon de Sergent Major Euismayer est limpide, elle pourrait même être jugée scolaire, si elle n'était pas accompagnée d'une grande rigueur dans la mise en scène et dans le montage. Sans compter l'interprétation impressionnante des deux protagonistes de ce récit, économe en émotion et en scènes explicites : Gerhard Liebmann et Luka Dimic. Sans faute de goût et sans dévier de sa ligne narrative, comme un bon soldat, le film entend montrer que le seuil d'intolérance peut reculer, au moins dans ce cas précis, mais que le combat pour le respect est loin d'être terminé.