Des banlieues sordides bâties à tout va, du pavillon Loucheur mal vieilli aux grands immeubles poussant comme des champignons au milieu des terrains vagues. Paris, à la fin des années 70, a une sale gueule. Une gueule hideuse qui laisse un immense sentiment de vide et d'ennui, au milieu de la circulation ininterrompue.
Poupart (Patrick Dewaere) est un raté, un minable, qui vit une vie sans grande signification dans cet univers triste où rien d'humain n'accroche. Ni son patron (Bernard Blier), cynique, ni la bonne femme qui vend sa nièce de seize ans (Marie Trintignant). Dewaere refuse d'y toucher. Un geste de douceur, de tendresse, dans l'univers clos de la gamine, et voilà qu'une porte s'ouvre sur un nouveau monde. C'est un amour désespéré et plein d'espoir à la fois. L'espoir qu'un ailleurs est possible.
Séduit par cet ailleurs, par cet amour candide, naïf, pur et sincère des premiers amours adolescents, Poupart se laisse entraîner. Et le voilà embarqué dans une affaire tout encore sordide qu'il ne maîtrise en rien, n'étant pas exactement l'homme de la situation, de cambriolage impliquant le meurtre d'un immigré grec avec qui il se lie trompeusement d'amitié dans des scènes d'ivresses nocturnes captées avec une vérité criante. Et Poupart débloque. Le jeu de Dewaere est explosif, viscéral, on est captivé.
Et puis toute la pression se relâche d'un coup. Sans le sou, juste une voiture, une fille de seize ans qui l'aime, plus rien ne le retient. Peut-être, alors, l'amour ouvrira la voie vers cet ailleurs rêvé — la poésie est « ce qui ouvre un espace » (Heidegger) ; l'espace ouvert est celui du refuge, de la fuite, loin de ce monde sinistre et absurde.