Une petite poupée remplie d'héroïne qui échoue à la mauvaise adresse, chez une jeune femme aveugle et dont le mari est absent.
Deux voyous qui tentent de la récupérer, bientôt rejoints par un troisième larron plus inquiétant, abstrait, machiavélique et possédant visiblement une longueur d'avance sur la situation. Les trois personnages tentent de mettre en place une combine pour faire avouer la femme, car la poupée ne peut qu'être forcément planquée dans le petit appartement. Sauf que la soirée passant, il devient évident que soit la poupée n'est jamais arrivée ici, soit la propriétaire des lieux ment éhontément. Petit à petit, le ton monte dangereusement...
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"Hepburn s'est préparé à ce rôle de femme devenue aveugle avec ardeur et méticulosité. Elle a passé des semaines au Lighthouse, un centre de réinsertion pour aveugles. Le studio voulait qu'elle porte des lunettes noires ou quelque autre indice de son handicap, comme une cicatrice, mais elle refusa catégoriquement. Hepburn préférait exprimer la cécité de son héroïne par un jeu qui venait de l'intérieur".
(Audrey Hepburn - Movie icons, éditions Taschen)
Audrey a bien fait de ne pas faciliter le jeu en prenant un quelconque substitut du handicap car ici, elle porte littéralement le film sur les épaules, à l'instar d'Alan Arkin, réellement impressionnant en psychopathe intégral avec ses lunettes noires. Face à un ennemi aussi redoutable (une scène déjà inquiétante dès le début du film en guise d'avertissement), le spectateur sait d'emblée à quoi s'en tenir et tremble d'autant plus pour le personnage d'Audrey. Tous deux sont d'ailleurs servis par une mise en scène sobre mais remarquable d'un Terence Young qu'on connait généralement plus pour ses James Bond (et pour bien isoler les personnages, plusieurs séquences se déroulent véritablement dans le noir, juste avec le son).
Le scénario se base sur une pièce en huis-clôt impressionnante de Frederick Knott (auteur originel de la pièce Le crime était presque parfait, repris ensuite par Hitchcock) mais semble assez respectueuse du matériau de base. Ainsi chaque recoin de l'appartement sera utilisé et dans le final, alors que l'obscurité progresse, la moindre lumière pourrait être fatale. Tout fonctionne comme une mécanique incroyablement bien réglée et débouchant sur une dernière demi-heure paroxystique qui en font un très grand film où toutes les potentialités d'un appartement se transformant en piège sont plus qu'utilisées.
Le film est un immense succès qui propulse Hepburn à deux nominations (oscars et golden globes), ce qui n'empêche pas peu de temps après à l'actrice d'annoncer solonnellement qu'elle arrête sa carrière. Constats et choix dictés aussi bien par sa vie privée (son mari Mel Ferrer, à la base acteur, mais aussi réalisateur --il dirigea d'ailleurs Audrey dans Vertes demeures en 1959-- et producteur de Seule dans la nuit, fait imploser son mariage. Audrey se remariera peu après avec le psychanaliste Andrea Dotti) que son goût de cinéma alors déclinant.
Promesse à moitié tenue toutefois puisqu'on la reverra par la suite de temps à autre dans deux, trois autres films mais ne possédant pas une aussi grande envergure que par le passé (j'aime bien Always mais aussi bien chez Hepburn que Spielberg, on atteint pas des sommets non plus hein)...