Le dernier film de feu Mike Hodges, c'est l'association surprenante entre de belles idées de mise en scène et d'ambiances néo-noir et une sous-écriture assez navrante à de trop nombreuses charnières scénaristiques. C'est du gâchis, de jouer sur des clichés mal maîtrisés à des moments trop importants. Direct, l'image du personnage vivant reclus dans les bois déballe sa lourdeur, avec tous les clichés qui s'amoncellent autour — il travaille dans la forêt, il vit dans son van, il est taiseux, etc. On ne peut pas dire que beaucoup d 'efforts aient été consentis pour rendre pertinente la transition du retour à la ville. Pourtant l'idée derrière le film qui joue beaucoup avec ce qui n'est pas dit, les raisons qui ont poussé Clive Owen à partir loin de sa vie passée dans la mafia londonienne, est séduisante, au même titre que l'ambiance très originale, je trouve, qui règne dans cette capitale britannique plus pouilleuse que jamais. L'absence d'information crée le désir de découvrir le pourquoi, et ça fonctionne pas mal.
Mais il aurait fallu d'une part plus de soin dans l'écriture de quelques personnages-clés, et d'autre part beaucoup plus de clarté dans les différents arcs narratifs qui se télescopent — il y a la mafia qui n'apprécie pas des masses de voir Owen revenir en ville et cet homme interprété par Malcolm McDowell ayant commis un viol sur le frère du héros (Jonathan Rhys-Meyers, pas beaucoup vu depuis "Match Point" qui sortira deux ans plus tard), et qui donner au film sa séquence la plus ahurissante, lorsqu'il révèlera les raisons de son geste. Grand moment pour une grand ratage.
Amusant aussi de voir le parallèle se confirmer avec son premier coup d'éclat, "Get Carter", retour d'un homme dans sa ville natale sur la piste du mystère qui entoure la mort de son frère. Assez minimaliste, et c'est une forme d'épure qui sied bien à l'ambiance, avec cette nervosité dangereuse qui maintient une certaine tension sans rechercher l'esbroufe. Il y avait dans cette tonalité crue un vrai potentiel pour montrer une plongée dans l'horreur en guise de retour aux sources, avec des personnages qui auraient gagné à être développés comme par exemple celui de Charlotte Rampling.