J'aime Kubrick. Vraiment. De tous les cinéastes que je vénère, il est et restera toujours le plus important à mes yeux car c'est lui qui m'a fait aimer le cinéma comme je l'aime aujourd'hui. Mais malgré tout cela, la révision de certains de ses films n'est pas toujours sans douleur, comme en témoigne ce Shining.
Comprenons-nous bien : je trouve Shining admirable sur de nombreux points. L'ambiance du film est remarquablement réussie, jouant parfaitement sur les paradoxes : claustrophobie dans un hôtel immense, luminosité extrême ou lumières soignées pour un film d'horreur, surf permanent entre réalité mélodramatique (une famille qui se décompose) et fantastique pur jus... Bref, Shining reste pour moi une référence en la matière, la preuve qu'il n'existe pas qu'une seule ligne de conduite pour réussir un film d'horreur et que jouer sur les émotions des spectateurs sur le long terme est cent fois plus efficace que de faire des jump-scares à profusion.
Ceci étant : je trouve le film assez superficiel sur d'autres points essentiels. Je ne me souvenais pas par exemple de l'omniprésence de la musique, assez kitsch, qui surplombe le film et tue parfois l'émotion d'une séquence qui aurait gagné à être baignée dans le silence. De même, on reste au final très en surface quant à la caractérisation des personnages, ce qui n'est pas très fréquent chez Kubrick, et on ne s'attache pas tant à Dany parce qu'il est le héros que parce que c'est un enfant maltraité. Enfin, et c'est le pire de tout à mes yeux : le casting est assez mauvais : Nicholson en fait des tonnes et crée une distance comique entre le spectateur et l'action, les seconds rôles sont fades et Shelley Duval est juste imbuvable, jouant faux de A à Z et ne créant jamais la moindre empathie pour son personnage ni crédibilité dans les moments de tension. Reste l'enfant qui, comme tous les enfants, est bon car jouant à fond son rôle.
Shining ne me semble pas, avec le temps, faire partie des meilleurs Kubrick ; il n'en est pas moins une valeur sûre dans son genre, et possède suffisamment de bons éléments pour rester très longtemps en mémoire après l'avoir vu. Mais peut-être faut-il juste se contenter de cette première fois ?