Je ne pense pas que l'intérêt du film pour Fuller résidait dans le scénario. Ne fut ce que la première scène, bien que intéressante, présente déjà les premières incohérences : notre journaliste de héros semble ne pas être prêt à se faire interner pour du faux puisqu'il commet encore des erreurs en répondant aux questions les plus évidentes du psy... 5 minutes après, toujours dans la même scène, on nous révèle que cela fait un an qu'il s'entraîne et qu'il est en fait... totalement prêt! D'ailleurs, autre symptôme, la fin est prévisible dès ces premières minutes. Il faut aussi avouer que l'idée de base est particulièrement stupide : un journaliste décide de se faire passer pour fou aux yeux de tous à l'exception de trois personnes, afin de se faire interner. Pensait il vraiment que ce serait si simple, à la fin de l'enquête d'aller trouver le directeur et de le convaincre que tout cela était faux et d'appeler ses amis pour le prouver? Dernier gros problème de l'histoire: comment les médecins peuvent ils croire qu'il est fou et puis qu'il ne l'est plus à la fin, sur simple déclaration de sa part... je sais que dans les années 60 la psychanalyse n'était pas aussi évoluée qu'aujourd'hui mais quand même. Cela paraît peu crédible. De même que le héros n'est jamais vraiment traité pour sa maladie de base, mais juste pour les accès de colère dont il fera preuve lors de son emprisonnement.


Soit. Le scénario n'est pas le plus important. C'est quoi alors l'intérêt? Je pense, et c'est ce qui m'a plu aussi, que Samuel Fuller voulait avant tout traiter de la folie, et la représenter. Autre intérêt, faire évoluer un personnage depuis la 'normalité' si je puis dire, à la folie. Et il est vrai que pour ça, le scénariste s'est lâché. J'ai cru lire ici et là que les folies représentées étaient plutôt clichées. Personnellement j'ai trouvé cela suffisamment original : un black qui se prend pour un blanc du KKK, un physicien qui se prend pour un gosse, un gros qui fait de l'opéra, ... C'est varié, c'est peut être facile, mais ça marche. Et puis surtout, l'auteur se permet de ne pas en présenter trop afin de mieux les pénétrer en profondeur. Car pour chacun des malades, on aura droit à une scène d'au moins 10 minutes. Ce qui permet donc d'affirmer que ce n'est pas si cliché que cela, c'est que l'auteur ne se contente pas d'un portrait superficiel, mais va au contraire, au plus profond de ses personnages.


Pour revenir à l'évolution du personnage principal, je l'ai trouvée au début maladroite. Ses moments de folie ne me semblaient pas crédibles. Et puis petit à petit, l'auteur amène des éléments qui crédibilisent la chose, ou en tous cas , dans un premier temps, qui sèment le doute: est ce que Johnny Barrett est fou ou bien il fait semblant pour tromper ses amis? Ensuite, le doute fait place à la certitude qu'il est bel et bien devenu fou. la dernière demi heure est certainement la plus alléchante du film, le journaliste ne sachant plus quoi faire, et se perdant dans sa propre folie mégalomane et schizophrène.


La caméra est plutôt bien placée. En somme, j'ai eu l'impression d'un montage plutôt moderne, au cut rapide, au rythme tenu. Sauf dans certaines scènes: aussi amusantes puissent paraître les scènes de rêve, il faut avouer qu'elles posent des problèmes de rythme par rapport à l'ensemble du film. Ensuite, il y a cette scène de strip tease du pauvre. Il n'y avait peut pas beaucoup de budget pour le film, mais là quand même... Finalement, le plus intéressant reste ces moments expérimentaux, où Fuller joue autant avec l'image que le son. Le résultat peut sembler aujourd'hui banal pour certain ; personnellement j'ai accroché et je me dis que pour l'époque ce devait être encore plus fort.


Bref, Shock Corridor est un film qui souffre malheureusement d'un scénario un peu décousu et rempli d'incohérences. En revanche, les personnages et leurs interactions sont plutôt bien écrites tout comme la mise en scène est intelligente et présente des passages expérimentaux bien foutus. Pas un chef d'oeuvre, mais un bon petit film.

Fatpooper
7
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le 27 juil. 2012

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Fatpooper

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