Petzi et ses nouveaux amis
La suite des Ailes du désir (1987), tournée en 1993. L'impatience de voir ce film de 140 minutes (environ quinze de plus que le premier) n'a eu d'égale, pendant la projection, que l'impatience d'en finir.
La trame tient en quelques lignes : Damiel s'étant cassé en 87 et la Stasi ayant disparu en 89, Cassiel se sent un peu seul pour surveiller tous les Berlinois de l'Est et de l'Ouest. Il profite donc d'une bonne action pour rejoindre les hommes. De son côté, Damiel a ouvert une pizzeria de quartier, le Dall'Angelo (Chez l'Ange) et vit heureux avec son adorable petite fille et sa femme Marion, laquelle continue son trapèze dans un cirque en perpétuelle faillite. Cassiel choisit tout naturellement pour identité Karl Engel (ange en allemand) et en avant, Marx ! À tout moment, des scènes rappellent le premier film. Bonne chance à ceux qui ne l'auraient pas vu. Entre deux, des moments pourraient être empreints de profondeur ou de poésie mais jamais la sauce ne prend. Pour faire solide, Wenders a enrichi sa petite équipe de quelques nouveaux : Mikhail Gorbatchev (caméo), Willem Dafoe et Nastassja Kinski, dont la beauté sublime et l'aura de mystère sont impuissantes à sortir le film d'une glèbe fangeuse. Et pour ratisser large, Wenders s'est encore assuré la participation de deux poids lourds du cinéma allemand : Horst Buchholz et le vieux vieux Heinz Ruhmann qui mourra quelques mois plus tard. Après le succès de l'opus 1 et dans la perspective escomptée du triomphe de cet opus 2, l'argent coule à flot et les intuitions au compte-goutte. Le pire, c'est qu'aucune n'est exploitée de façon cohérente et aboutie. La fuite dans les idées, quoi. De déception en consternation, on assiste au revival pathétique d'un film lumineux, à une navrante rencontre de vieux copains qui évoquent le passé en en rejouant sans discernement les meilleures scènes.
Les Ailes du désir, en 1987, avait beaucoup tiré de la tension Est-Ouest dont Berlin était le point de fracture. Une fois le Mur tombé, la vie des anges dans un Berlin devenu l'emblème du capitalisme triomphant ne pouvait apparemment plus être porteur de la même énergie.