Non, Sicilian Ghost Story n’est pas le remake sicilien de A Ghost Story, sorti il y a quelques mois dans nos salles. Il s’agit d’un film étrange, combinant les influences des teen-movies du cinéma américain indépendant avec celles de l’expressionisme allemand.
Dans la Sicile des années 1990, le téléphone portable n’existe pas encore. Pour se déclarer leur flamme, Luna (Julia Jedlikowska) et Giuseppe (Gaetano Fernandez), âgés de 13 ans, préfèrent s’égarer dans les forêts enchanteresses de l’île, lors du retour de l’école. Peu après, Giuseppe ne vient plus à l’école et la porte de sa maison reste désespérément fermée. C’en est trop pour Luna qui tente de comprendre ce qui lui est arrivé.
Les auteurs abordent l’état émotionnel de leurs personnages en sondant leurs rêves et leur subconscient. Ainsi, ils transcendent un sordide fait divers en un conte romantique aux accents gothiques. Il faut dire que la Sicile, terre mythologique à la nature sauvage et imprégnante, se prête particulièrement bien à la divagation onirique. On reste subjugué devant la lumière saisie par la caméra du directeur de la photographie Luca Bigazzi, qui reconstitue un univers tout droit sorti des contes de Grimm et du cinéma allemand des années 20. Le film se nourrit de ces multiples références pour construire un univers à la beauté sombre et singulière. Dommage que le ton très poétique du film soit entrecoupé par des scènes plus réalistes, nécessaires pour faire avancer le récit mais qui n’ont pas la même capacité hypnotisante que ses errements expressionnistes. L’expérience reste toutefois amplement aboutie et on aurait tort de ne pas embarquer dans ce train fantôme.