Fervent catholique s'étant essayé au séminaire à l'âge de 14 ans, Martin Scorsese a parsemé sa filmographie de foi et de spiritualité, de Mean Streets à La Dernière Tentation du Christ en passant par Kundun. Cherchant à concrétiser l'adaptation de l'oeuvre originale de Shusaku Endo depuis vingt ans, Scorsese réalise avec Silence le projet d'une vie, une oeuvre testament où il questionne avec verve la question de la croyance. Pour son métrage probablement le plus personnel et surtout le plus exigeant, le cinéaste invoque l'épure totale, délaissant son énergie visuelle reconnue pour une quête initiatique aux limites de la contemplation. Cette retenue ne plaira pas à tout le monde, d'autant plus qu'il ne cherche pas l'émotion ni l'identification pour les personnages, toujours prosterné devant son questionnement fondamental. Mais on ne pourra renier la puissance formelle du film, de l'utilisation du 35mm aux lumières naturelles de Rodrigo Prieto, en passant par l'austérité fascinante de l'environnement sonore où jamais une plainte de souffrance hors-champ n'a été aussi tétanisante. Vous n'aurez pas à partager les mêmes fondements intimes de Silence pour vivre la puissance indéchiffrable de ce chemin de croix, un grand film de cinéma aussi strict qu’enivrant où dans la brume de la douleur vacille le feu fragile de la conviction.
https://shawshank89.blogspot.fr/2017/02/critique-silence.html