Je vais attaquer directement à la question qui nous intéresse. Est-ce que Sinister fait flipper ? Oui, ô grand Oui, Oui avec une majuscule. En toute franchise, ça fait des années que je n’avais pas flippé de cette manière au point de commencer à craindre le film. Vous savez cette peur qui vous pousse à vous demander pourquoi vous ne foutez pas le camp de la salle – et en courant. Le genre de peur qui vous amène à vous rassurer en vous martelant mentalement qu’il ne s’agit que d’un film. C’est simple, j’ai beau chercher dans ma mémoire, je ne me rappelle pas de la dernière fois que j’avais autant sué devant un film et c’est une grande joie qui m’a envahi. « Une joie ? Mais t’es malade mon petit Marvelll ? ». Non, je ne le suis pas, j’étais tout simplement heureux de flipper, me remémorant ainsi des années perdues de ma jeunesse où avec mon frère, ma cousine et des amis, on se planquait derrière la couverture en regardant un film d’épouvante interdit par les parents (tant pis pour les nuits de cauchemar qui suivent). Je pensais ne jamais retrouver ce sentiment et encore moins au cinéma mais le long-métrage de Scott Derrickson l’a fait.
Si Sinister réussit à faire flipper autant, c’est grâce à une équipe magique : un acteur exceptionnel, un réalisateur intelligent dans ses plans et sa mise en scène, un jeu de lumière réussi et une bande son jouant avec le spectateur. Par la suite, je vais m’attacher à rendre hommage à chaque membre de l’équipe mais avant, je voulais souligner un scénario malin. Il est agréable d’avoir deux scénaristes ne prenant pas le spectateur pour un con. Je m’explique. Combien de fois avez-vous vu dans les films d’horreur, ces fameuses bûchettes de téléphone portable réduites à zéro ou quand les mecs trouvent la solution miracle en cherchant sur internet – Google est si puissant ? Tu veux une preuve du respect des scénaristes? Prenons un exemple avec la coupure des lumières dans la maison (un classique), le héros sort son téléphone portable et lance l’application permettant de diffuser de la lumière, merci Dieu, c’est que toute personne sensée ferait et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres. Il est agréable de ne pas en permanence remettre en cause les ficelles scénaristiques ringardes (on est au 21ème siècle, bordel !).
L’autre atout concerne aussi l’histoire. Loin de rester cloîtré au fameux film de flippe avec la famille qui emménage dans une maison et badaboum, un monstre chelou apparaît et leur fait des misères – le même sujet classique que le toutefois bon Insidious. Sinister approfondit vraiment son personnage principal quitte à faire passer les autres membres de la famille au second plan voir en figuration. Porté par un génial Ethan Hawke, Ellison le héros n’est pas sans rappeler le culte Jack Torrance de Shining, tu sais, le mec joué par Jack Nicholson et même dans le film, il était tellement fou de sa femme qui voulait la mater en train de prendre sa douche – quoi de plus efficace que se faire une ouverture à coup de hache ? Bref, le personnage principal de Sinister est loin d’être lisse, il est manipulateur, ment comme il respire et est davantage porté par ses peurs et sa volonté de retrouver la gloire que l’amour de sa famille. Un homme quoi. L’intelligence du film est d’approfondir ses peurs les plus primaires de façon insidieuse (merci à Insidious pour m’avoir fait découvrir ce mot me faisant passer pour plus intelligent que je ne le suis réellement) à dose d’alcool et d’une enquête pour le moins bouleversante. Avant de passer à cette fameuse enquête, un petit mot pour l’acteur. Génial tout simplement dans ce rôle pourtant peu évident consistant à attirer la sympathie du spectateur tout en étant un anti-héros au comportement loin d’être irréprochable, le Jack Torrance du 21ème siècle (bon, je ne dis pas non plus qu’Ethan va jusqu’à égaliser la monstrueuse perf’ de Jack).
Le film est assez jubilatoire par sa manière d’aborder les choses. Au lieu d’attendre que les choses se fassent, il amène le héros à aborder les choses frontalement. Ellison sait que quelque chose de mal s’est déroulé dans la maison et c’est même son but. Il se met alors au même niveau que le spectateur qui va voir le film pour voir des trucs bad. Ellison ne sait pas encore ce qui ne va pas et progressivement, en même temps que nous, découvre le mal abrité par la maison. Ça change de ne pas avoir un temps d’avance sur le héros. Sans oublier que les fameuses vidéos (snuff movies) arrivent assez vite, ne nous laissant pas vraiment le temps de nous ennuyer (juste un peu en fait). S’en suit alors une enquête pour découvrir l’origine de ces vidéo.
Rapidement, on se rend compte de la présence d’un Mr Boogie. Un boogeyman parmi les plus terrifiants du cinéma (sa première apparition fout une frousse bleue). Le background historique autour de Mr Boogie renforce sa légende au lieu de la diluer dans des explications détruisant le mythe. Une énorme réussite. Le pire, c’est que ce #@$% de boogeyman se permet de vous faire sursauter plusieurs fois et m’a même fait disparaître mon sourire de petit con. Je m’explique, auparavant les gens de la salle avait sursauté pour des trucs que je sentais venir, je me suis alors sorti une phrase du genre « Oh c’est mignon tous ces petits peureux » jusqu’au moment où Mr Boogie m’a fait sursauter comme une jeune pucelle devant son premier film d’épouvante à base de « Boooh sur l’écran ». Encore on pourrait s’arrêter là si le réalisateur ne jouait pas à merveille avec le spectateur. Par exemple sur cette séquence assez longue où Ethan Hawke déambule dans la maison à la recherche de l’origine d’un bruit, la musique est là pour nous signaler le moment flippant qui va arriver sauf qu’elle joue avec nous et assez longuement et au moment où on dépose les armes et ben, PAF! La goutte de pisse dans le caleçon…
Le film n’échappe pas à quelques défauts comme le démarrage assez longuet dont je vous ai parlé brièvement… Euh, ben c’est tout je crois. Ah si, la fin est un peu prévisible. On devine le twist final vers la moitié du film mais ça ne dilue en rien à sa puissance (pire même, le fait de deviner qu’il va se passer nous rend encore plus parano et on s’inquiète vraiment pour Ellison). Un petit mot pour finir cette critique, les snuff movies, pour une fois réellement found fountage, du film sont malsains, flippants, dérangeants et… subjuguant comme la séquence vidéo culte de la K7 du film The Ring avec une ado qui ne connaît pas le coiffeur. Ces snuff sont filmés en Super 8 renforçant leurs statuts de films démoniaques d’un autre temps.
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