Six Minutes to Midnight est un thriller d'espionage qui, sans aucun doute, ne tardera pas à rejoindre le cimetière cinématographique des œuvres « à peine parues – déjà oubliées ».
Ce film, du réalisateur anglais Andy Goddard, est sorti fin 2020, dans une parfaite indifférence, directement en VoD (comprendre : aucun distributeur n’en a voulu pour une sortie salle, aucune plateforme n’a trouvé bon de l’intégrer à son catalogue de contenus).
La réalisation du film est correcte : sans coup de génie, mais d’un classicisme très British, elle sert intelligemment l’intrigue. La colorimétrie de l’image place d’emblée le film dans son contexte historique d’une entre-deux Guerres sur le point de se terminer ; et le lieu choisi pour le récit, un vaste manoir servant d’école de jeunes filles, est un vieux poncif du cinéma. Le spectateur sait globalement où il met les pieds.
Côté intrigue, c'est là que ça se corse. L’idée de base était pourtant plutôt aguichante. A l’aube de la Seconde Guerre mondiale, nous suivons l’arrivée d’un nouveau professeur – en réalité un agent des services secrets de sa Majesté – dans une école pour jeunes filles de hauts dignitaires nazis, située sur la côte anglaise.
Attention, la suite contient quelques spoilers…
Rapidement, on découvre que les espions allemands locaux sont entrés en possession d’un microfilm contenant la liste de tous les agents britanniques travaillant incognitos en Allemagne.
L’enjeu pour les Alliés est alors double : empêcher la fuite de ces informations qui s’avèrent capitales à quelques jours du début des hostilités, et déjouer les plans d’évasion des jeunes filles afin de les constituer prisonnières de guerre.
C’est là que le scénario devient tarabiscoté et bourré d’incohérences. Bien que tout dans le film nous y pousse (et avec de gros sabots), j’ai vraiment du mal à entrer en empathie avec cette vingtaine de jeunes filles issues des jeunesses hitlériennes, écoutant mutiques et béates les discours du Führer, préférant plaisanter en allemand, et faisant de la gymnastique avec leurs bérets vissés sur leurs têtes et minijupes comme uniforme.
Franchement qu’elles arrivent ou non à monter dans cet avion pour les ramener dans leur mère-patrie, j’en ai rien à cirer.
Or, c’est sur cet axe narratif que le film s’appesantit. L’autre axe, celui du microfilm et des agents britanniques infiltrés, n’est qu’à peine effleuré, comme s'il s'agissait d'un poids pour le scénario dont on ne saurait que faire. Et c’est bien dommage, car c’était à mon avis la partie la plus intéressante du récit !
Côté acteurs, si le professeur-espion Miller, incarné par Eddie Izzard est plutôt convaincant, le manque de caractérisation des jeunes filles expatriées, et le manque d’envergure des agents qui gravitent autour de l'école, sont affligeants.
On se demande bien comment Judi Dench (la super actrice qui incarnait notamment M. dans les 007 de Daniel Craig) s’est retrouvée dans ce merdier. Ses dernières apparitions, dans Cats, Artemis Fowl, et maintenant Six Minutes to Midnight, n’ont vraiment pas été des choix très heureux.
Vous l’aurez compris, Six Minutes to Midnight n’est pas un grand film, il s’agit d’un thriller qui joue maladroitement la carte de l’espionnage, quitte à y laisser sa cohérence et à s’enliser dans les clichés.