Lancinant mais fortement évocateur
The Sky Crawlers est un gros choc culturel à plusieurs niveaux :
1) Ça parle d'enfants militaires pilotes de chasse qui vont aux putes, fument comme des sapeurs, se murgent au vin rouge, couchent les uns avec les autres et développent des névroses suicidaires. S'il n'a pas été interdit d'exploitation aux US, je ne sais pas ce qu'il leur faut.
2) Le film est lent. Alors on reste assez loin des longs plans contemplatifs d'Avalon ou des envolées meta-bibliques d'Innocence mais le rythme laissera sur la touche quiconque n'est pas habitué au cinéma asiatique.
3) On ne comprend pas grand chose, et ça ne va nulle part. Le background politique n'est qu'esquissé et sert de toile de fond, on en sait pas beaucoup plus à la fin qu'au commencement et le déroulement ne fait que confirmer des soupçons qu'on peut avoir dés le début, sans chercher à étourdir à coup de twist sidéral. Ici, ce n'est pas la destination qui importe mais la beauté du voyage.
Et cette beauté est bien au rendez-vous : une beauté plastique qui mêle dessin et image de synthèse avec le même brio que les Ghost in the Shell, en proposant des séquences de vol sublimes et des décors très fouillés qui contrastent malheureusement un peu trop avec les personnages tellement minimalistes qu'on peine parfois à les différencier.
Le fond n'est pas en reste, avec des personnages tourmentés que l'on suit avec intérêt et des scènes émotionnellement très puissantes.
J'en suis ressorti légèrement insatisfait, sans vraiment savoir quoi en penser, même si je suis sûr d'en garder d'agréables souvenirs. Finalement, je lui reproche surtout ce qui fait l'originalité de sa construction narrative : à savoir le fait de n'aller nulle part, de ne pas vraiment avoir de début et de fin, de ne pas développer d'arc scénaristique ni d'expliciter son univers. Il y aurait peut-être perdu une partie de son cachet "art et essai" mais aurait plus facilement remporté l'adhésion du spectateur qui peut se sentir un peu lésé par un dénouement qui laisse tout en plan.
Et une fois de plus, pour un film d'Oshii : Une mention spéciale à la BO de Kenji Kawai qui déchire des bébés phoques.