Second film vu de Mamoru Oshii après son emblématique Ghost in the shell. Le moins qu'on puisse dire c'est que son style est immédiatement reconnaissable. Longs plans contemplatifs, musique lancinante à t'électriser l'épiderme, personnages prisonniers d'eux mêmes, enchaînant leurs atermoiements quant à leur identité évanescente...
S'ouvrant sur une séquence de bataille aérienne absolument sublime Sky Crawlers surprend tout de suite par son parti pris esthétique, entre personnages au design minimaliste et interchangeable calqués sur des paysages en 3D d'une texture curieuse aux perspectives presque dérangeantes, rappelant les pires heures du jeu vidéo balbutiant ses cubes. Ça fait faux, c'est très certainement voulu. Ça n'en est pas moins moche. (C'est d'autant plus curieux que les avions modélisés en 3D sont eux saisissants de beauté).
Sur le fond, Sky Crawlers est d'une mélancolie quasi schizophrène. Le personnage principal nouvellement affecté à une base aérienne, s'étonne de ne dénicher aucune information sur son prédécesseur sans pour autant s'en émouvoir. Détail, comme ses camarades, c'est un Kildren, un éternel adolescent dont l'unique but dans l'existence est de combattre pour le compte d'une société privée, elle même agissant pour le compte de la confédération européenne. La géopolitique de Sky Crawlers n'est un qu'un faible murmure dans le background de l'histoire. Tout se concentre sur le mystérieux prédécesseur, ses relations passées avec sa supérieure, personnage froid, implacable, pourtant seule dotée de sentiments rugissants qui mettent à mal sa fonction.
Sky Crawlers évente en cinq minutes l'intrigue principale. On devine tout de suite le pot aux roses quant à ce mystérieux pilote disparu. Suivre Sky Crawlers a pour unique objectif de comprendre pourquoi on en est arrivé là.
Renvoyant dos à dos les notions d'existentialisme et de déterminisme à travers ses deux personnages principaux, Sky Crawlers créée une distance excessive avec l'audience. Se devant d'être purement logique, le spectateur est embrigadé dans un jeu de piste, entre répliques sibyllines, non dits et plans insistants, un peu vain qui dessert l'objectif premier : susciter l'émotion.
Visuellement inégal mais globalement flatteur de rétines, scénario complexe dans sa simplicité teintée d'une SF discrète mais bien présente, énième resucée de concepts philosophiques vus et revus, Sky Crawlers est avant tout une illustration angoissante d'un état hors du temps et du monde : le purgatoire dans toute son absurdité.