Slocum et moi, réalisé par l'illustre Jean-François Laguionie, plonge le spectateur dans les années 1950 en suivant le jeune François et son père Pierre, qui se lancent dans la construction d’une réplique du célèbre voilier de Joshua Slocum. Cette aventure, ancrée dans le jardin familial au bord de la Marne, devient un miroir des rêves et des tensions entre un père et son fils. À travers la fascination de François pour Slocum, le film aborde les thèmes de la liberté, des liens familiaux, et des aspirations personnelles, apportant une touche poétique à ce « voyage immobile ».
La force du film réside dans sa sensibilité et sa tendresse. La relation quotidienne entre François et Pierre est décrite avec précision et finesse, reflétant un malentendu affectif qui rend leurs échanges à la fois touchants et authentiques. Le scénario, empreint de douceur, laisse transparaître une poésie discrète, où chaque scène est une invitation à apprécier la simplicité d'un rêve en construction. Cette approche élémentaire confère à l’œuvre un charme reposant, rendant l’histoire accessible et sincère.
L'animation laisse à désirer. Coincée entre deux techniques, elle ne parvient pas à trouver son identité. Le mélange de 2D et de 3D n’est pas toujours harmonieux, donnant un rendu hésitant et parfois maladroit. La 3D, partiellement masquée par des textures et des traits de crayon papier, manque de cohérence, et le style visuel, loin de se démarquer, reste décevant. Le résultat manque de franchise. Les textures pauvres et les couleurs ternes n’apportent pas la richesse visuelle attendue, et l’aspect statique de l’animation renforce cette impression d'indécision. Le film manque aussi cruellement de vie et de mouvement.
Narrativement, le récit souffre d’un sérieux manque de variété. Bien que les relations et les thématiques abordées soient pertinentes, l’histoire est anecdotique, peinant à justifier la mise en chantier d'un long métrage. De nombreux passages creux nuisent au rythme, et la contemplation, au lieu de renforcer l’ambiance, semble forcée, créant un sentiment de lenteur qui dilue l'intérêt. La musique, elle aussi, n’apporte que peu de relief, contribuant à cette atmosphère plate.
Slocum et moi est un film attendrissant, qui touche par la pureté de son message et la beauté poétique de certaines scènes, mais qui reste limité par ses choix techniques et son rythme contemplatif couvrant le vide scénaristique. Cette œuvre pourra charmer les amateurs de récits introspectifs, mais risque de laisser sur leur faim la plus grande partie du public à la recherche d'une intensité dramatique et narrative plus prononcée.