Avant Vassili Zaitsev (Jude Law) - vrai héros du peuple russe - dans les décombres fumantes de “Stalingrad” chez Jean-Jacques Annaud ou encore Chris Kyle (Bradley Cooper) - héros controversé aux Etats-Unis - dans les ruines irakiennes pour “Américain Sniper” de Clint Eastwood, il y a eu en 1993, Thomas Beckett (Tom Berenger) dans la jungle panaméenne devant la caméra de Luis Llosa (“Anaconda”) pour les besoins de “Sniper”. Ces personnages - de fiction ou non - ont incarné l’une des figures emblématiques du cinéma martial, mais aussi l’une des plus opaques - le tireur d’élite. De la Seconde Guerre mondiale aux conflits irakiens, les époques changent et les guerres évoluent au gré des administrations diplomatiques et stratégiques. Et c’est justement, la stratégie de la politique extérieure US en Amérique centrale qui sera la pierre angulaire du scénario de “Sniper : tireur d'élite”, en faisant du personnage principal (Bérenger), le bras invisible et armé de la toute-puissance étasunienne. Mais le tribut à payer est lourd pour celui dont la mission consiste à devenir un fantôme qui tue. Comme si le personnage torturé et violent du Sergent Barnes de “Platoon” lui avait survécu, Thomas “Tom” Beckett est toujours sur le sentier de la guerre. Le prologue nous fait découvrir une ombre dans la jungle puis une deuxième, car si le sergent Beckett tient l’arme, son second, le caporal Papich (Aden Young) est l'œil du tireur. Dans leurs viseurs, un chef de guerre ! De cette entrée en matière rugueuse, Luis Llosa va dérouler un long-métrage âpre et cynique, lorsque Beckett doit faire équipe avec le sous-lieutenant Richard Miller (Billy Zane), un civil inexpérimenté. Celui-ci, mandaté par ce qui semble être la CIA, a pour mission de faire assassiner le général Alvarez et Ochoa, le baron de la drogue qui travaille pour lui. Les deux hommes que tout oppose vont devoir cohabiter en milieu hostile… Affublé d’une ribambelle de suites plus ou moins acceptables (plutôt moins d’ailleurs), “Sniper : tireur d’élite” s’est malheureusement retrouvé noyé dans un sous-genre d’action, pas toujours fréquentable lors d’une décennie difficile en matière de cinéma. Pour son trentième anniversaire, le film mérite une éventuelle sortie en Blu-ray, mais surtout une réévaluation (avis perso), pas forcément pour ses scènes d'action - un peu datées - mais plutôt pour son côté dénonciateur de l’ingérence américaine sur le reste du monde.