Au départ, on pense que le post-apo sera le sujet du film. Bien vite, on se rend compte qu’il s’agira d’autre chose : une satyre politico-sociale mise en image de manière vidéo-ludique par un cinéaste talentueux dont la mise en scène hybride est au service des personnages et de leur cheminement.
Vidéo-ludique car il s’agit d’évoluer d’un point A à un point B en passant par une succession de wagons « salles-épreuves » à la fonctionnalité bien définie. Le point A étant l’arrière crade du train ou cette classe sociale de sous-ouvriers est exploitée et contrôlée par « les autres » prépare sa rébellion, et ambitionne de rejoindre l’hypothétique exutoire à leur situation, le Point B, l’avant du train. Cette orientation est un choix plus que judicieux car il permet de renouveler régulièrement l’implication du spectateur via la compréhension de plus en plus complète de ce train-univers.
Le discours politique est aussi très présent, quoique peu original. Cette lutte des classes sur fond de révolution a déjà été vue dans des classiques comme soleil vert ou même, rien que cette année, dans Elysium, ou le schéma politico-science-fictionnel est déroulé avec moins d’acuité et d’efficacité. Ce discours s’estompe néanmoins au cours du film, au profit d’une dimension plus humaine d’un coté, et d’une logique scientifique de l’autre.
Le film reflète surtout la vision de l’humanité par Bong Joon Ho. Car chaque personnage n’est finalement que l’expression d’un sentiment plus ou moins négatif. Même si la mise en scène de BJH peut parfois, comme d’habitude dans son cinéma, désamorcer par l’humour (noir) certains moments très violents, durs ou cruels, on n’en retient pas moins une vision pessimiste de l’avenir de l’homme.
Héros ou méchant, ces termes n’existent pas vraiment dans Snowpiercer. Chacun agit selon des motivations qu’il est impossible de deviner avant qu’elles soient expliquées.
Force et limite du film, car arrivés vers la fin, on attend simplement une explication de plus pour combler les trous scénaristiques. Celle-ci, d’ailleurs, n’atteint pas totalement son objectif: Un petit arrière goût de trop plein d’informations vient atténuer la puissance du propos.
Snowpiercer, un film oignon ou les couches successives (scénaristiques, émotionnelles et esthétiques) forment un tout cohérent et passionnant.