Ce film s'inscrit dans la lignée des fresques bibliques comme Samson et Dalilah ou les Dix commandements, mais n'a pas cependant le charme kitsch hollywoodien, il s'agit d'une co-production franco-italienne avec une participation du studio 20th Century Fox, tournée à Cinecitta avec un budget pas trop ridicule qui tranche avec les autres péplums italiens de la même époque, plus modestes. On sent que le film souffre de ce statut de co-production internationale assez impersonnelle où se retrouvent pêle-mêle Robert Aldrich, Sergio Leone, Stewart Granger (dont l'époque de gloire hollywoodienne était finie), Anouk Aimée, Stanley Baker, Pier Angeli, Rossana Podesta, Rik Battaglia, Gabriele Tinti et un reste de casting purement italien.
On ne reconnait pas grand chose de la patte d'Aldrich, rien qui rappelle le brio de En quatrième vitesse, de El Perdido ou de Attaque, il fut certainement gêné par les 3 scénaristes qu'on lui imposa, par Sergio Leone qu'on lui adjoignit pour les scènes d'action, et par les exigences de la censure qui voyait dans le sujet traité (les villes débauchées de Sodome et Gomorrhe punies par le châtiment divin) un moyen pour tourner des scènes orgiaques. On est pourtant loin de la sulfureuse réputation qu'avaient ces 2 cités dans la Bible, le personnage de la reine fut considérablement édulcoré, et on ne voit aucune scène explicite si ce n'est quelques beuveries comme dans tout péplum à cette époque.
Aldrich aurait sans doute voulu une description plus poussée du peuple sodomite en montrant que cette civilisation court à sa perte par une lente décomposition, de même que les Hébreux fidèles aux principes de leur race, ont fini par sombrer eux aussi dans la débauche et la corruption. Mais il s'est contenté de filmer avec un talent certain cette histoire de l'Ancien Testament (assez remaniée) sans chercher à imposer sa volonté et les thèmes qui lui sont chers. Sergio Leone l'a épaulé pour la scène de bataille et certaines scènes de foule, ce qui représente à peu près 4 à 5 jours de travail.
C'est donc plus un péplum italien qu'hollywoodien, le style est à l'ancienne, les effets spéciaux sont pas trop mal : la scène d'engloutissement par les eaux du Jourdain comporte des transparences visibles mais les scènes de destruction de Sodome sont assez réussies, à peu près identiques à celles des Derniers jours de Pompéï auquel avait participé aussi Sergio Leone. Même la musique de Miklos Rosza a moins d'éclat, le grand maître hongrois semble moins inspiré même si sa partition est de belle tenue ; parmi les scènes marquantes, on retient la bataille, l'engloutissement des eaux, le combat singulier entre Stewart Granger et Stanley Baker, la destruction de Sodome et la statue de sel... tout ceci constitue un ensemble qui manque de souffle épique mais qui reste quand même regardable sans ennui.