Nightmare sista...

Cette critique fait partie de la liste "Brian De Palma: Voyeurisme et Cinéma"
https://www.senscritique.com/liste/Brian_De_Palma_Voyeurisme_et_cinema/1600322

Lors de ma première vision de ce film, il y a quelques...temps lointain, je n'avais pas apprécié ce Sisters.
Mais je n'arrivais pas à en saisir le pourquoi.

Aujourd'hui, je sais!

Ce film est en fait un véritable cauchemar éveillé.
La réalité n'a plus de sens, du fait du Docteur Emil Breton qui brouille les cartes à force d'hypnose...

Emil Breton (l'étrange William Finley)est le directeur d'un institut psychiatrique expérimental: en effet, ses patients peuvent aller et venir comme bon leur semblent ou même, prendre logis au centre-ville.

Ainsi, Danielle Breton (la mignonne et intense Margot Kidder) -son ex-femme- a un appartement sur Staten Island.
Après avoir participé à un show télé bien-nommé Peeping Tom, elle y fait la connaissance du séduisant Philip (Lisle Wilson) et l'invite chez elle.

Mais elle n'y est pas seule...

Dans l'ombre, veille Dominique...

Sa jumelle...

Éjecté d'un projet ciné, un De Palma pas dépité, tenta de trouver un pitch scénaristique pour se remettre en selle.
Il eut un déclic lorsqu'il parcourut un article sur le cas dramatique des sœurs Krivoslyapova, siamoises enlevées à leur mère et séquestrées dans des instituts "médicaux" Russes, où elle furent soumises à toute sorte de test, débordant plus ou moins vers la torture expérimentale...

De Palma n'en retint que le concept des siamoises et une certaine idée d'expérience médicale.

Il développa son récit avec l'aide de la scénariste Louisa Rose puis offrit les 3 rôles principaux à ses proches: ses camarades William Finley et Jennifer Salt (tous deux déjà présent dans les précédents films du réalisateur), ainsi que sa petite-amie de l'époque, la troublante Margot Kidder.

Après tant d'années de galère, De Palma réussit enfin à faire un film à succès, malgré le fait que Sisters soit bien éloigné de par son ton cauchemardesque, des gros films bankable de l'époque...

Il faut dire qu'il a réussi à embarquer sur son projet, le compositeur attitré de son idole Hitchcock: Bernard Hermann.

Ce qui tombait bien puisque De Palma avait utilisé en temp track, la BO de Psycho pour illustrer son pré-montage...
...ce qui provoqua une réaction allergique à Sieur Hermann lorsqu'il entendit ses notes, plaquées temporairement sur la copie de travail!

Mais Sisters n'aurait pas aussi bien fonctionné sans l'interprétation incroyable de Margot Kidder.
En effet, celle-ci est tour à tour l'innocente et séduisante Danielle ou la torturée et démente Dominique.
Pour différencier les deux incarnations, Kidder contorsionne son visage et son regard devient extrêmement inquiétant, en prenant une voix plus aiguë.
De fait, on a l'impression de voir un avatar du bon Docteur Jekyll et de l'affreux Mister Hyde...
Très efficace, au demeurant!

William Finley est toujours aussi étrangement fascinant, de par son regard myope et son visage inquiétant.

Ce qui a retenu aussi mon attention, ce sont deux séquences dans l'appartement de la jeune femme:
-l'une suit la scène du show Peeping Tom et nous montre Philip et Danielle s'embrasser passionnément, dans l'appartement de cette dernière.
De Palma filme la scène de telle manière, que ça m'a aussitôt mis dans la position inconfortable d'un voyeur.
-l'autre c'est l'inversion empathique présentant la journaliste/témoin du meurtre Grace Collier et son côté fouine insupportable lors de la fouille de l'appartement et le côté "innocent" et naturel de Danielle, face aux accusations du meurtre -pourtant réel- d'un homme...

Bref, Sisters est une œuvre très intéressante mais assez inconfortable à voir, sans compter une fin assez abrupte et laissant beaucoup de questions en suspens.