On suit pendant 1h15 les déambulations interminables et répétitives d’un Jacques Tati du pauvre. Oscillant entre naturalisme plat et burlesque ridicule, le film de Dervis Zaim a un propos dont la minceur n’a d’égale que la sidérante laideur de l’image. ‘Somersault in a Coffin’ ennuie malgré sa durée modérée.

C'est l'histoire d'un marginal, d’un voleur. Il ramène à l'aurore les voitures dérobées dans la nuit et les laisse à l'endroit où il les avait volées. Il vit sur la rive du Bosphore avec des pêcheurs qui lui permettent d'obtenir le minimum de nourriture nécessaire. Un beau jour, dans les ruines d'un château-fort, il découvre un paon qui lui paraît un volatile tout à fait comestible.

J’ai découvert ce film grâce au Festival ‘L’heure d’Hiver’ qui est consacré à Istanbul vue par le cinéma et dont la programmation laisse pour l’instant à désirer. Car le film est déroutant. C’est le moins que l’on puisse dire. Il n’y a aucun fil narratif, pas d’enjeux scénaristiques. Le principe du film est de suivre ce Hobo turc dont on ne sait rien. On ne connaît pas son passé, on ne sait rien de ce qu’il pense. L’intrigue est vraiment mince. Il n’y a pas grand-chose à se mettre sous la dent. En omettant sciemment de nous donner les tenants et aboutissants de son film, Dervis Zaim pense sans doute faire un film poétique mais oublie d’intéresser son spectateur.

Le film commence par une succession de scènes relevant du plus plat des réalismes sociaux. Le Hobo nettoie des toilettes, s’achète de l’alcool, vole des voitures, discute avec des pêcheurs. Une jeune droguée se pique dans les toilettes dont il a la charge. Il va évidemment tomber amoureux d’elle. Les premières scènes sont longues, sans intérêts. Le cinéaste turc veut inscrit son histoire dans la quotidienneté. Conséquemment, les scènes se répètent inlassablement.

Des touches de burlesque parsèment le film avant de devenir prépondérantes dans sa seconde moitié. Le comédien joue beaucoup de son corps désarticulé, se balade avec un paon dans les bras, escalade avec difficulté une haute grille. Un personnage entre Chaplin et le Mr. Hulot de Jacques Tati, notamment dans son rapport à la modernité et sa façon d’être perpétuellement « à côté ». Il faut le voir hésitant, perdu en observant la caméra d’une journaliste en reportage. La seule bonne scène du film. Gand adorateur de Tati et amateur des film de Chaplin, je n’ai pourtant pas été sensible à cette poésie toc et à ce burlesque cheap. Le burlesque a besoin de profondeur, comme chez Tati par exemple. Mais elle est ici aux abonnés absents.

A la petitesse du fond, s’ajoute la forme disgracieuse. L’image est d’une étonnante mocheté. On sent que le film a été tourné à l’arrache, avec un faible budget. Est-ce pour autant une raison de ne pas soigner la photographie ? Dervis Zaim abuse des chromos. Les images sont tantôt rouge (pourquoi ?), tantôt d’une blancheur de clinique. Enfin, quand l’image est sombre, on ne distingue plus les formes.

Vous l’aurez compris, je n’ai pas du tout été intéressé par ce film dont le sens et la raison d’être m’ont échappé. Vu dans le cadre d’un festival de cinéma centré sur la ville d’Istanbul, la salle de cinéma était remplie par la communauté turque qui riait et semblait bien réagir au film. Sans doute ne suis-je pas sensible à l’humour ottoman.

Noel_Astoc
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le 14 mars 2023

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