Soul Docter
Reprochez ce que vous voulez à Pixar, mais la firme à la lampe n'est pas dénuée à la fois d'ambition dans les histoires qu'elle veut raconter comme dans la manière dont elle les raconte ainsi que...
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Nulle chose n’est absolue, telle la déception : car contrairement à ce que le dénouement de Soul imprime, à savoir un sentiment mi-figue mi-raisin exacerbant ses quelques faiblesses, la magie de Pixar ne s’est pas pour autant tarie. Mieux encore, et fort heureusement, elle le sauve et le porte bien au-delà… au cœur d’une « zone » que le studio se plaît à explorer encore et encore, berceau du grand frisson, de l’euphorie pure.
Et, pourtant, ce dernier long-métrage se saborde bel et bien : d’abord au gré d’un second acte coupables d’errances vaudevillesques, à même d’assombrir son inventivité première et de probantes séquences, ensuite de par ce fameux tomber de rideau dont la facilité et la prévisibilité (craintes) contredisent l’excellence du tout. Malgré cela, le tandem de l’indécrottable Pete Docter et du prometteur Kemp Powers, épaulés par Mike Jones au scénario, parvient bien à tirer son épingle du jeu… avec la manière.
Aussi, qu’en aurait-il été si Soul avait eu le cran de se conclure sans céder aux sirènes du « rassurant » ? Faute d’une leçon complète et d’une teneur inéluctable, dans la droite lignée d’un cocktail de concepts transcendant l’existence, le grand sacre lui aura donc échappé. Mais trêve de regrets : ceux de Joe Gardner, assortis de remords mordants, se suffisent bien à eux-mêmes. Un bien bel anti-héros que voilà d’ailleurs, Pixar n’ayant décidément pas son pareil pour faire (ré)fléchir ses personnages… et nous avec. À ce titre, le parcours de ce professeur de musique désabusé est riche de nuances : le bougre suscitera à la fois notre sympathie, pitié et antipathie au gré d’une palette de tons toujours pertinents.
S’il est en effet d’abord des plus aisés de le soutenir dans ses déboires, saupoudrés d’un destin tragique, Soul opère un tour de force à l’orée de son fameux second acte : et si celui-ci n’est pas exempt de tout reproche, il faut bien convenir qu’il n’en demeure pas moins brillant au global. Par l’entremise de 22, qui instaure une opposition lourde de sens mais plutôt bien exécutée avec Joe, le long-métrage va faire évoluer ses deux protagonistes avec brio (ou le savoir-faire « pixarien ») : de quoi broder une réflexion duale tant autour du poids des attentes, obsessions et l’aveuglement inhérent, et de l’autre la passion dans son plus simple appareil, fruit grisant s’il en est.
S’il ne les égale pas, les prétentions et atouts de Soul ne sont alors pas sans évoquer Vice-Versa, au regard de son ingéniosité conceptuelle et formelle, ainsi que Coco, le trépas et l’après tombant sous le sens ainsi que… l’importance de la musique (la famille aussi). Bien que certainement moins centrale ici, du moins en termes d’enjeu véritable (l’avenir et l’accomplissement de Joe), elle constitue pour autant une part non négligeable de l’identité du film, identité aux deux facettes : le jazz de Jon Batiste, vivier inépuisable de rythmiques, soubresauts et couleurs… et les compositions profondes, denses et (paradoxalement) aériennes de Trent Reznor et Atticus Ross, influant directement sur la teneur du « Grand Avant » et du « Grand Après ».
Bien qu’aux antipodes, ces deux approches s’avèrent être de parfaits supports aux idées de Soul, décidément bien pourvu en la matière : dans sa capacité à nous toucher, interroger et, bien entendu, émerveiller, celui-ci ne nous laisse guère indifférent. Reste donc ses accès d’humour parfois bien dosés, parfois moins et un empressement à se conclure le desservant : heureusement, nous retiendrons davantage sa plastique subjuguante et son atmosphère ensorcelante, n’en déplaise à ses erreurs et autres incohérences… qu’il eût été ardu d’éviter lorsqu'est imaginé pareil univers.
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Créée
le 21 mai 2021
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