Parmi ses dix longs métrages, les films de Pialat étaient souvent issus de souvenirs autobiographiques.
D'ailleurs, vous en saurez déjà plus sur l'homme en regardant, outre ce documentaire réussi, le deuxième fllm du réalisateur, et second plus grand succès commercial : "Nous ne vieillirons pas ensemble" avec dans cette déclinaison actualisée de "la belle et la bête" : Marlène Jobert et Jean Yanne, tous deux excellents...
Lequel ne tourna d'ailleurs jamais plus avec Pialat tant la relation entre les deux hommes sur le plateau avait été infernale. Entre les deux hommes ? Pas seulement : le plateau était trop souvent un ring, un enfer que les équipes de tournage appréhendaient...
Quand on se voit soi-même au travers d'un autre (cf :film précité) qui joue votre rôle avec vérité, l'épreuve doit être terrible et vous devez sûrement avoir envie de vous frapper ? D'où cet aspect agressif de celui qui n'aime pas ce qu'il est ?
Mon commentaire sur le film évoque, lui aussi, l'aspect ombrageux, desposte, écorché vif du "personnage-Pialat", que seul Depardieu semble-t-il, arrivât à apaiser, canaliser.
Avec le second accusant le réalisateur de tout vouloir saborder sur un tournage et le faire reprendre par quelqu'un d'autre, et un ¨Pialat se défendant de ne jamais avoir envisagé d'arrêter un film en cours de route.
Avec aussi un Guy Marchand jetant l'éponge, désabusé, consterrné car n'arrivant pas à apaiser les débordements colériques du réalisateur.
Le cinéma est fait de ces contradictions comme jadis un Fernandel "encensant" de Funès après sa mort, le considérant comme ami proche, alors qu'il, le détestait et s'échinait à bénéficier des meillleurs angles de prises de vues pour ne pas être éclipsé par ce rival inopportun...
Un commentateur au début du documentaire constate : "une aigreur constante" de Pialat qui trouvait peut-être son origine dans le constat qu'il lui semblait avoir tout raté : sa vie sociale, professionnelle : 10 films sur une carrière avec un premier long métrage à 43 ans, c'est peu... surtout après une tentative infructueuse auparavant de peintre artistique.
William Karel a dû, lui aussi subir les excès tyranniques du personnage... Sur ce point, on n'en saura rien... Pas plus que sur la vie privée de Pialat...Par contre, cette biographie représente une excellente synthèse de l'aspect public de l'homme... Et de ses relations tumultueuses avec les acteurs :
Sophie Marceau confesse qu'elle a dû pour "Police" recommencer 30 fois la scène où elle est violentée par Depardieu : "Ca vous change l'idée qu'être comédienne au cinéma constitue une vie idyllique" témoigne-t-elle... Une autre avoue que, si c'était à refaire, elle ne signerait certainement plus...
Ce documentaire est une perle car Karel a su réunir des commentaires de personnes ayant "vécu" Pialat, d'archives de tournages tumutueux ou non... En tout cas, il constitue un témoignage vivant, objectif, duquel toute condescendance ou flagornerie sont éliminées.
Cette objectivité de Karel n'est pas toujours le cas d'autres biographes car souvent, il faut attendre d'être mort pour qu'on dise autant de bien de vous ! Au point qu'on aurait envie à la fin d'en savoir encore plus sur ce bien étrange et controversé Pialat !
Contrairement aux versions plurielles d'un premier film à succès dont chaque suivant devient de plus en plus pénible...Pialat ? Je t'aime, moi non plus...
Arte le 17.10.2021