Lire en se relaxant, Fine On The Outside, Ost de Omoide no Marnie
C'est souvent quand arrive le printemps que je me vois porter tout naturellement vers le film d'animation, et plus particulièrement ceux de Ghibli.
Qu'est ce que cela traduit... je ne sais pas.
Je me suis souvent demandé si c'était le retour des beaux jours qui m'intimait le besoin impérieux de contempler des paysages estivaux sublimés qui exercent sur moi un effet apaisant des plus appréciable, ou peut-être est-ce au contraire l'écoulement du temps, symbolisé par la fin d'une année scolaire, qui amène chez moi une douce nostalgie que je retrouve exprimée avec tant de justesse dans les œuvres nipponnes. Ou encore une indicible envie de retrouver cette saveur de l'enfance qui s'échappe au fur et à mesure que le temps passe...
Toujours est-il que Les Souvenirs de Marnie m'est naturellement venu à l'esprit, un soir où je parcourais ma vidéothèque à la recherche d'une douceur à me mettre sous les yeux. J'avais pour ambition, présentement, de parcourir l'intégralité de la filmographie du studio japonais dans un ordre chronologique, mais j'ai cédé à la curiosité, tant le film d'Hiromasa Yonebayashi me faisait de l’œil de par son affiche soignée. La dualité exprimée, les deux protagonistes enlacées mais se tournant le dos, complices mais étrangères, la mer d'opale qui clapote à leurs pieds et s'étend par delà l'horizon, bref, c'était un vrai piège pour moi. N'ayant pas pu aller le voir au cinéma, mon impatience était d'autant plus grande.
Pourtant, Hiromasa Yonebayashi ne m'avait pas laissé un souvenir impérissable avec son premier film, Arrietty le petit monde des chapardeurs, où j'avais peiné à ressentir la patte de cet homme discret, effacé, peut-être encore trop dirigé par un Hayao Miyazaki très impliqué dans toutes les étapes de la création.
Aussi, Souvenirs de Marnie, sorti au Japon en juillet 2014, me semblait être la parfaite occasion de voir à l’œuvre un réalisateur alors appelé à remplacer les illustres papas de Totoro et autres Pompoko.
Adapté d'une nouvelle de Joan G. Robinson -nouvelle recommandée par Miyazaki- Souvenirs de Marnie nous immerge, le temps d'un été, dans la vie d'Anna, jeune fille au caractère taciturne, solitaire. Rongée par la timidité, elle se renferme sur elle-même, agrippant comme une bouée son carnet à dessin dans lequel elle s'applique à reproduire la vie qu'elle contemple. Asthmatique, elle est envoyée par sa mère adoptive à la campagne chez les Oiwa, couple excentrique et jovial qui vit près d'un marais relié à la mer. Sur l'autre berge, non loin de là, Anna découvre la "Maison des Marais" pour laquelle elle éprouve une véritable fascination, qui ira croissante lorsqu'elle rencontre une jeune blondinette élégante du nom de Marnie avec laquelle elle développe une amitié fusionnelle. Mais Marnie disparaît mystérieusement le jour pour ne réapparaître qu'à la nuit tombée. Qui est-elle réellement ?
Le visuel, mes amis, le visuel. C'est un tel régal pour les yeux de voir des paysages si profonds, des couleurs si chaudes, des plans qui s'apparentent à de véritables aquarelles. Quel beauté dans l'animation, animation qui a pour l'occasion été délégué par Hiromasa Yonebayashi à Mr Ando, qui ne travaille pas pour les studios Ghibli. De même, le directeur artistique vient du cinéma classique, ce qui confère à ce film une patte singulière qui tranche quelque peu avec les œuvres plus classique du studio sans trahir ses origines, conférant une saveur particulière au film de Yonebayashi.
Et cette marque Ghibli, on la retrouve jusque dans cette thématique du passage de l'enfance à l'adolescence, mais résolument tournée vers une autre direction. Point de monstres à affronter, d'aventures extraordinaires à surmonter, les soucis sont plus communs : l'abandon, l'enfermement sur soi, la solitude. Ici, et selon les mots du réalisateur, le but est de
dépeindre sans artifices une jeune fille de douze ans.
Héroïne réservée, pudique, l'épanouissement d'Anna qui s'ouvre au monde grâce à l'amour de son entourage nous est décrit avec une douceur rare. Poétique, le récit navigue sans cesse entre rêve et réalité pour mieux nous plonger dans l'intimité de cet enfant si renfermée. Lorsque soi-même on a longtemps été cette personne, on ne peut que constater le soin apporté au développement de ce personnage et la bienveillance d'un réalisateur qui a sûrement mis une bonne part de lui même dans Anna
(Non, ce n'est pas sale)
Vecteur d'émotions intenses, Souvenirs de Marnie est pour moi le premier film de Hiromasa Yonebayashi, film véritablement personnel, il y développe son univers et sa vision de la plus belle des manières. Restent quelques défauts de rythme, quelques lenteurs inhérentes à la nature contemplative de ce film, rien qui n'empêche d'apprécier cette très belle performance et de souhaiter revoir au plus vite Yonebayashi aux commandes.
Espérons que la com' sera meilleure, car ce film a souffert d'un manque de visibilité regrettable...