Se souvenir des belles choses
Souvenirs de Marnie est un film adroit qui parvient à outrepasser le fait que sa résolution soit connue à l’avance par le spectateur. En effet, sur le plan narratif pur, on comprend, assez rapidement, le dénouement (du moins dans ses grandes lignes, restons modestes) mais au final, ce n’est pas le plus important.
Ce qui est merveilleux et brillant dans ce film, c’est le traitement du souvenir vu comme un hôte presque désagréable, comme une possession. On pourrait croire au départ, à une histoire classique de fantôme du passé, hantant un manoir mystérieux, mais au final c’est bien plus que cela. Anna subit complètement les apparitions de Marnie, elle devient elle-même hantée, hantée par le souvenir. Yonebayashi relève le défi haut la main et nous emporte complètement dans cette histoire magnifique.
Côté animation et réalisation, pour ma part c’est un sans faute. Le film est sublime, les paysages d’une délicatesse infinie. Mon coup de cœur reste la maison de l’oncle et la tante d’Anna, havre de paix zen, bercé par la brise maritime. On a envie de dormir dans ce lit, de lire sur le perron avec, à l’oreille, le tintement de la petite cloche suspendue, de cueillir ces tomates juteuse à souhait ou encore de tailler quelques chouettes en bois, confortablement installé dans un fauteuil.
Chaque détail de cette maison sous le soleil confère encore plus d’effroi lors des scènes de fugues nocturnes d’Anna au bord du marais. Il y a tant de bien-être ici, que nous sommes pris au ventre lorsque la jeune fille se rue ailleurs, là-bas, même si Marnie a quelque chose d’absolument séduisant. L’interdit n’en est que plus palpable.
Dommage donc que le côté artificiel de la résolution gâche un peu la fin du film. On ne sait si le réalisateur a voulu coller au plus près du livre, mais la deuxième « révélation » est de trop. Cependant, ce petit accroc est rapidement oublié tant le souvenir de ce film est doux et délicat.