Une araignée dans le bocal

Après Avengers : Endgame, qui mettait un point final à une aventure de plus de dix ans, Spider-Man : Far From Home pourrait s'envisager comme une des scènes post-générique que l'écurie Marvel a démocratisée, tant l'absence totale d'enjeux relatif au Marvel Cinematic Universe semble patente.

Si cela peut permettre de nous débarrasser des tisse-froids, c'est toujours ça de pris, après tout.

Parce qu'il n'y a clairement plus grand-chose à gérer des retombées liées au gant de l'infini. Sauf que Peter doit faire le deuil d'une figure de père et de son mentor. Il doute même qu'il se hissera un jour à son niveau et des espoirs que Tony Stark a placé en lui. Rien de mieux donc qu'un peu de vacances histoire de se rebooster le moral et de s'occuper, enfin, de sa vie privée.

Far From Home a conscience d'arriver après la bataille, et donc de sa position bâtarde en forme de film post scriptum dont on se dit qu'il n'apportera absolument rien à l'univers étendu.

Dans un premier temps, donc, Jon Watts se contente donc de réinvestir un maximum dans son côté teen comedy, plutôt bien exploité et en phase avec son personnage, d'autant plus qu'il s'élargit en mettant en avant des personnages comme Betty Brand ou les professeurs accompagnateurs de cette sortie européenne, tous les deux particulièrement dans le zef et incapables...

... Et de se laisser libre cours à l'alter ego du tisseur. Et à son vague à l'âme. Et à ses manques, ses faiblesses. Et à ses hormones, ses plans improbables et maladroits pour se rapprocher de M.J.

Il y aura donc encore du Ultimate Spider-Man des comics dans ce Far From Home, qui se fout visiblement de sa soi-disant mission de mettre fin à la phase 3 du MCU et des attentes une fois de plus démesurées du public, en transe sur la seule foi d'une bande annonce promettant a priori un futur multivers.

Sauf que Far From Home reste vissé à sa chronique adolescente, pas toujours finaude par l'humour parfois employé, mais plutôt plaisante à suivre.

Et surtout, sauf que Far From Home cause de faux semblants et d'illusions, de manipulations et des actuelles fake news, comme le laissait présager l'apparition de Mysterio et de son bocal à poisson sur la tête, et dont Marvel tire une quintessence réjouissante alors que le personnage était très casse gueule dans sa représentation live.

Far From Home reproduit donc la réussite de Homecoming en tirant pleinement parti de son antagoniste, en l'inscrivant dans une relation de substitution avec Peter Parker... Tout en en abandonnant la réalisation parfois anonyme et perfectible. Jon Watts, en effet, réussit à surmonter certains de ses problèmes de montage en offrant une action toujours claire et lisible. Et exécutant cette fois-ci un véritable climax spectaculaire à son héros.

Ainsi qu'une séquence hallucinatoire rafraîchissante et extrêmement bien menée, déstabilisant un peu plus encore le fragile Peter Parker, et lui rappelant au passage qu'il n'est encore qu'un adolescent incertain et malléable ayant besoin de quelqu'un pour le guider. Une scène qui figurera à l'évidence comme une des plus efficaces du MCU, tout en prolongeant la thématique du faux semblant en la muant semble-t-il, en réflexion sur la nature intrinsèque du blockbuster...

Far From Home se payera même le luxe, en fin de parcours, d'ouvrir des pistes plus qu'intéressantes pour Spider-Man et le secret de son identité, tout en renouant avec une composante bien connue de son univers que Marvel avait quelque peu perdu de vue.

C'est que l'on était loin d'attendre le nouveau Spider-Man sur ce terrain : celui de sa propre mythologie, qu'il raccroche à merveille, en forme de très bonne surprise rejetant sa bête fonction de coda d'une fresque qui avait été bouclée déjà quelques mois plus tôt.

Behind_the_Mask, qui s'étonne de la petite taille de l'antenne de Spider-Man.