D’un point de vue cinématographique, le monde de Spiderman n’est plus un mystère pour personne. Après la très bonne trilogie de Sam Raimi, et le diptyque bancal de Marc Webb, voici que l’homme araignée revient avec un nouvel opus pour tisser sa toile dans le MCU. Alors qu’il nous avait fait un caméo dans Civil War, cette fois ci, il a droit à son propre film. La première chose qu’il est possible de noter, c’est la capacité de Homecoming à tout de suite s’insérer dans l’organigramme même du MCU. L’histoire reprend là où elle s’était arrêtée après Civil War. Spiderman est Peter Parker, un jeune adolescent, pas encore Avengers, qui ne connait pas encore trop son rôle chez les super héros. Iron Man joue les parrains accompagnateurs un peu distants.
Le jeune homme se retrouve donc un peu le bec dans l’eau : doit-il privilégier sa vie d’adolescent ou laisser ses amis sur le bas-côté de la route en passant son temps dans ses rondes nocturnes pour devenir un vrai Avengers. Comme dans Iron Man 3, le poids du costume, la prédominance du costume sur l’homme ou l’inverse, est le thème principal d’un film, au mélange des genres un peu bâtard.
D’ailleurs le costume est l’un des points clés du film et du modernisme de la vision même de Spiderman : au lieu de voir le super héros comprendre ses pouvoirs surhumains, il essaye tant bien que mal d’appréhender toutes les ficelles de sa nouvelle combinaison high tech forgée par Iron Man. Il va sans dire que Homecoming est un pur film de l’esprit MCU : réalisation à la photo neutre mais dynamique, écriture efficace mais un peu volatile, humour infantile servant de vecteur de dédramatisation du récit. La recette est là : d’un côté comme de l’autre, DC et MCU, les ingrédients n’ont plus le même goût et le spectateur est de moins en moins surpris.
Mais ça ne veut pas dire que le cahier des charges ne regorge pas d’idées intéressantes : Homecoming, par exemple, rentre directement au cœur de son sujet et n’encombre pas son fil narratif de rappels passéistes déjà connus de tous comme la mort de l’oncle Ben ou la piqure par l’araignée. Les références à ces événements sont présentes mais vite éconduites pour laisser place au véritable fil rouge d’Homecoming : la possibilité de Spiderman de gagner en légitimité aux yeux de Iron Man.
Comme dit ci-dessus, Spiderman est un adolescent, qui bafouille et qui s’existe pour un rien, à la fois euphorique et mélancolique, qui rappelle plus celui incarné par Andrew Garfield que celui joué par Tobey Maguire, avec un sens du phrasé prépondérant et un humour au combat plus prononcé. Et en ce sens, Jon Watts et son équipe décident d’immerger Homecoming dans les entraves du teen movie, sincèrement assumé. Les références au film de Hugues sont visibles mais pas transformées car la sauce a du mal à prendre : le pote geek un peu bedonnant et drôle, la fille espérée un parfaite et au bon sentiment qui suinte la guimauve, l’équipe de compétition de concours avec l’asiatique intello et le pote riche aigri. On connait la chanson.
Ce nouveau Spiderman, incarné par Tom Holland, est autant une comédie pour les adolescents, qu'un actionneur de super-héros, de bluettes bourrées de jeunes amoureux, de meilleurs amis geek, de compétitions scolaires et de papas intimidants. James Watt n’utilise pas le genre teen movie pour y installer une ambiance ni un semblant d’introspection du passage au monde adulte, mais s’en sert dans le seul objectif de combler les trous, à coups de punchlines un peu maladroites ou de side kicks balourds.
Et ce point de vue-là, Homecoming perd beaucoup en charme, car le film ne semble jamais existé et est surtout d’une fadeur assez improbable visuellement. L’œuvre se suit, le tempo est assez énergique, mais le tout est anecdotique. Alors que la filière DC parachève ses films d’un pyrotechnie balbutiante et aveuglante, Marvel la joue plus humble dans ses scènes d’actions et dans ses climax, comme en témoigne cette pâlotte séquence sur le ferry, mais à force de jouer les roues de secours et le gendre idéal gentillet, Homecoming porte les mêmes stigmates que son personnage : le film ne sait pas s’il est un teen movie ou un film de super héros, il ne sait pas s’il doit parler de Peter Parker ou de Spiderman, et garde le cul entre deux chaises.
D’ailleurs la réelle force du film n’est pas son personnage principal mais son bad guy, c’est qui est assez rare chez MCU : le rôle de Keaton en Vautour, aux motivations humaines identifiables et qui s’inscrit parfaitement dans l’encrage même de la firme Marvel. D’ailleurs en ce sens-là, dommage que le film ne met pas plus en exergue les critiques pouvant être faites à ses super héros, sur le lien et la vente d’arme (Iron Man par exemple).
Au final, Homecoming fait du surplace : ne révolutionne en rien, ni n’avance en rien la mythologie Spiderman dans la sphère cinématographique et sert de bouche trou dans l’échiquier temporel de MCU.