Ce film a trente ans de retard.
Vendu comme un renouveau de la saga (un autre) après l'insignifiance du déjà tardif huitième opus, présenté comme quelque chose de plus sérieux avec l'implication de Chris Rock et Samuel L. Jackson au projet (seriously ?), Spirale est un vrai film de torture pour le spectateur. Ou un nanar de luxe sur lequel se fendre la poire. Au choix.
En 2005, Saw se présentait comme le digne successeur de Seven, LE thriller des années 90, avec un scénario plutôt malin, un goût prononcé pour le gore choc et une mise en scène semi-clippeque qui en faisaient une nouvelle référence, le thriller de la décennie suivante en somme. Le reste de ses suites tournées à la va-vite pour faire du fric se ressemblaient toutes comme deux gouttes d'eau, singeant la réal' de James Wan jusqu'à la galvanisation écœurante.
En 2021, Darren Lynn Bousman revient donc refaire des siennes après une carrière déchue et pond de nouveau la même mise en scène clippesque (comprendre "je fais des accélérations en faisant trembler ma caméra"), les mêmes rouages, les mêmes débilités que lorsqu'il s'occupait des premières séquelles. Quelqu'un lui a dit qu'on était en 2021 ?
En gros, on a affaire à un neuvième opus écrit par un fan de 14 ans qui continue d'exploiter des ficelles pourries, des situations grotesques, des dialogues science-fictionnels, le tout enrobé par une histoire ringarde et jamais entraînante. Il y a une succession de séquences dans ce film à faire pâlir Key & Peele. Le coup classique du flic taciturne qui n'allume pas la lumière quand il rentre dans l'appart de son père, qui a des flashbacks de passages où il n'était pas présent et qui prend des selfies avec un témoin à qui il vient de bousiller la jambe. Les victimes qui tombent dans des pièges qui n'attendaient que eux. C'est festival.
Ce film a trente ans de retard.
Entre les séquences de remplissage inutiles, les dialogues subtils, les flashbacks de série TV, l'interprétation caricaturale, les jump scares soporifiques et les ruptures de ton façon Joss Whedon (Chris Rock est un comique black à la base, alors faut qu'il fasse des vannes sur de la musique hip-hop pour rester crédible), Bousman s'imagine être un Messie pour la saga, rajoutant de la terre sur le cercueil en croyant le déterrer. Techniquement et scénaristiquement, le pire film de la franchise mais aussi le plus drôle. Être consterné ou hilare : faites votre choix.
Spoiler : oui, Samuel L. Jackson nous balance un "motherfucker". Le minimum syndical.