Après un The Visit bancal mais éminemment sympathique et malsain, c'est avec ce Split que l'ami M. Night Shyamalan signe son véritable retour. Un retour aux sources de ses thématiques, de ses mécaniques, de l'atmosphère tendue et énigmatique qu'il installe et que l'on ne retrouvait que par instants dans ses oeuvres précédentes. Exit donc les produits de pure commande, les règlements de comptes un peu puérils et ses petits égarements caca prout.
Split renoue donc avec la plume du réalisateur d'origine indienne, ainsi qu'avec un personnage charismatique et ample dans lequel James McAvoy se fond avec une gourmandise non feinte. S'il apparaîtra parfois aux yeux des plus critiques en surjeu, il faudra cependant rappeler que, parmi les nombreuses personnalités de son personnage, il doit donner vie à un enfant de huit ans, dans tous les excès de son comportement, dans la joie comme dans la peur. A l'autre bout du spectre, il y a cette menace sourde et puissante, cette personnalité machiavélique et totalement perdue dans le mal de ses actes.
Si Shyamalan réussit à mettre en scène son rôle principal comme les multiples morceaux d'un miroir qui se serait brisé à terre, il est un peu dommage, à l'écran, que seulement cinq ou six personnalités soient finalement exploitées dans les ressorts de l'intrigue, le temps de désorienter les victimes du déséquilibré et de manipuler une thérapeute fascinée par le cas pathologique qu'il représente, faisant vivre à lui seul l'aspect psychologique du thriller qui est ici proposé.
Le réalisateur indien bâtit sur ce rôle casse gueule un scénario assez tendu et fort, où le 6ème Sens du spectateur se débat et se met en alerte, en quête de Signes pour anticiper le twist qui ne manquera sans doute pas de venir. Le huis-clos est à ce titre très réussi, dans un décor assez craspec et brut de décoffrage, baignant dans une ambiance de peur de tous les instants, dans une violence aux éclats fugitifs et forts. Mais le retour de Shyamalan, cependant, n'est pas total. Car le maître du rythme qu'il était autrefois est en demi-teinte, ce que les presque deux heures de film confirmeront. Certains passages assez verbeux auraient pu être passés sous silence, même s'ils n'affectent pas de manière rédhibitoire le sentiment que laisse le film. Et Shyamalan est toujours aussi virtuose dans le placement de sa caméra. A ce titre, la séquence initiale de l'enlèvement est un petit bijou qui, une fois mis en parallèle avec une séquence de "poursuite", en illustrera toute la malice.
Split, pour faire court, installe une tension parfois diabolique quant à la nature réelle de son personnage métaphorique, dont on assiste littéralement à la naissance douloureuse et puissante. La mise en parallèle avec sa victime, l'étrange et magnétique Anya Taylor-Joy, envisagée comme un personnage "soeur", donne tout son sel à un scénario finalement classique, dont le twist "apparent" pourra décevoir, dans un tout ça pour ça ? un peu dommage...
... Jusqu'à ce que le spectateur rapproche le final de l'exploitation d'une certaine force super-héroïque marquant, encore, un retour aux sources des thématiques de M. Night Shyamalan... Pour que, seulement quelques secondes plus tard, celui-ci imprime sur sa pellicule un visage bien connu. Si le fan hurlera d'abord de joie dans un "Ouais !!!" extatique, la mise en pratique de la formule Marvel, ainsi qu'un certain problème de sens et de raccord pas très réfléchi lui fera dire, peut être, que Shyamalan n'est pas Incassable.
Behind_the_Mask, qui n'a pas beaucoup de personnalité.