Split signe le grand retour de du réalisteur M.Night Shyamalan,et confirme son regain de forme, après The Visit. Cela se traduit par un scénario tout à fait original, qui surprend, et repose surtout également sur une interprétation magistrale de son acteur principal, James McAvoy.
Chose encore plus excitante, ce film est à mettre en parallèle avec un autre film phare de la filmographie du réalisateur indo-américain, Incassable. C'est ce que l'on va essayer de décrypter dans cette critique. Si vous ne voulez pas vous faire spolier, passez votre chemin.
23 personnalités déroutantes
Split nous raconte comment un homme victime d’un trouble dissociatif de l’identité et doté de 23 personnalités différentes kidnappe trois jeunes filles, les retenant prisonnières dans son sous-sol. Persuadés qu’un 24ème fragment appelée “La Bête” est sur le point de surgir, deux de ses personnalités nommées Dennis et Patricia ont pris le contrôle. Dans un délire proche de l’illumination religieuse, les deux compères souhaitent nourrir la Bête, qu’on devine cannibale, avec les trois adolescentes qui vont tout faire pour s’échapper. Le film relate les tentatives d’évasion de Casey, Claire et Macia, ainsi que les réactions de leur ravisseur qui adopte tour à tour différentes personnalités, tout en entretenant le mystère de la véritable nature de La Bête dont l’existence ne reste pour le moment qu’une hypothèse.
A travers le personnage du Dr Fletcher, psychiatre spécialisée dans les troubles dissociatifs, nous découvrons peu à peu qui est l’homme aux 23 facettes ainsi que les raisons de sa condition, survenue durant une enfance traumatique. Ce type de trouble mental apparaîtrait majoritairement en cas d’abus physique, dont la victime développerait des personnalités alternatives plus fortes “prenant la lumière”, et donc le dessus, afin de protéger l’identité de base. Ici, on finit par apprendre que l’identité originale s’appelle Kevin.
Pas un seul twist shymalanesque mais deux
Le sujet du film n’est pas sans rappeler United States of Tara, série racontant le quotidien familial d’une femme en proie au TDI, et une des rares œuvres à aborder le sujet de manière aussi frontale. Souvent, on a l’occasion de voir des thrillers jouant sur la dualité du personnage principal (Enemy, The Double, et ce fameux film culte de David Fincher), mais rarement plus. Difficile de traiter de ce sujet sans tomber dans le cliché, et on imagine que les personnes atteintes du trouble auront à redire sur Split. Mais comme nous n’en faisons pas partie, affranchissons-nous de cette réflexion.
Dans le dernier quart d'heure du film, avec l'apparition de ce fameux 24e fragment que l'on attend tout au long du film, le film plonge dans le surnaturel, le fantastique, si cher à son réalisateur. Et le film prend un premier virage. Cette Bête dispose de qualités physiques insoupçonnées, qui lui permettent de grimper aux murs, d'écarter des barreaux à mains nues, de résister aux balles de fusil...
Après avoir tué et dévoré les deux autres filles, La Bête poursuit Casey à travers les couloirs du sous-sol en vue de lui faire subir le même sort. Lorsque tout semble perdu, Casey dévoile un corps rempli de cicatrices. Hantée par son enfance marquée par des abus incessants, elle pratique l’automutilation. La Bête reconnaît en ces cicatrices la marque de ceux qui ont, comme Kevin, souffert aux mains de leur entourage. Elle décrète que Casey “fait partie des leurs”, l’épargne, et s’en va. Malgré la maladresse de cette scène qui peine à faire le lien direct entre l’automutilation de Casey et le fait que La Bête l’épargne, elle entame pourtant une réflexion sur le message de Shyamalan dans Split. Split est une apologie de l’empathie, de l’ouverture à l’autre, et de la communication. Et ici, le titre s’affiche, comme un gong sonnant la fin du match. Mais, même si le film aurait très bien pu s’arrêter là, le vrai twist de fin se cache juste après.
2ème twist de fin : Split est un film de super-héros
Alors que le spectateur s'apprête à rassembler ses affaires pour quitter sa confortable place de cinéma, une musique bien connu commence à apparaître. Le thème d'Incassable se joue, sans que l'on comprenne trop pourquoi, et l'on arrive très vite à faire lien avec le génialissime film du début des années 2000, lorsque le bon vieux Bruce apparaît à l'écran. Pendant que nous étions obsédés à tort par le moindre détail révélant qui était la personnalité de qui, M. Night Shyamalan renverse la réalité d’un film entier en quelques secondes pour nous faire comprendre qu’il n’était pas situé dans le monde réel, mais dans l’univers d’Incassable. Un film de super-héros donc, mais profondément ancré dans la réalité. Ce qui, au final, est complètement cohérent avec tout ce que nous venons de voir. En quelques instants, nous comprenons que nous ne venons pas d’assister à un simple thriller, mais aux origines du prochain super-villain que David Dunn aura à affronter, 15 ans après les évènements d’Incassable. Split est tout simplement Inclassable.