Il est de ces films bruts qui vous hantent sans que vous ayez le savoir du « pourquoi ». Artiste puissamment déglingué au décoffrage facile, Harmony Korine filme. L'Amérique et ses pires débauches. Il le fait comme personne. Spring Breakers est une autre poésie, un souffle new-age au grand savoir humain. Premiers plans, sea, sex, bear and bikinis. Amusant sans l'être mais amusant. Suite au soleil et à l'euphorie, l'ennui. Couloirs déserts et ville morbide sans intérêt. En son sein sont quatre jeunes filles. Baignant dans une industrie lancinante et scolaire, elles rêvent de s'évader. Elles attendent de se trouver, de plonger dans un bain de vie et de chaleur. Elles croiront le trouver aux Spring Breaks. Univers purement pulsionnel. Le film n'est ni noir, ni blanc, ni vérité, ni mensonge. Tout est tout. Intègre, humain... Rien ne se cache. Seuls des visages trop propres et enfantins se couvrent. Cagoules roses et petites filles, les anges déchus trop propres, souillées d'embrasser, par amour, un mort. Le désir d'adrénaline et de frisson n'a de cesse d'augmenter. Une effrayée, une brisée, deux parties. Restent les guerrières avides de vengeance face à une vie qui ne leur a pas assez donné. Leur sauveur, séquestreur bling-bling et pourtant discret, n'est plus rien. Les Spring Breaks sont un passage pour celles qui savent qu'elles y trouveront leur compte. Les protagonistes sont des purs de l'impur. Un adulte/enfant à l'étalage matériel excessif qui ne sait que faire de ses abus. Une pulsion brute et clichée à l’intérêt décadent. Quatre croqueuses de vie liées par une étrange amitié. La fin reprend le plan moteur du départ. Ce qui s'est alors déroulé change la donne. Amusant ce n'est plus. Protubérances mammaires helliumisées, gramme de gélatine fessière au mettre carré, clip assumé, le tout donne la nausée. A coups de morceaux électro Korine est le maître d'une œuvre paradoxale et fortement maîtrisée. C'est fluo, féminin, flash, fantaisiste... Tant pour servir sa brillante et informe critique emplie de rage et de brutalité. Ce stratagème atteint son appogée lors de la reprise d'une (trop) célèbre chanson pop. La douceur musicale sur fond de couché de soleil contrecarre la violence ambiante. Le tout s'achève en bain de sang, situation renversée tant sur le fond que la forme. Un ponton noirâtre scintille, les rôles se confondent et le bikinis s'éloignent. Spring Breakers est une bombe emballée dans un papier à friandise froissé. Une chronique brutale, douce/amère et marquante sans autre prétention que celle de dire la vérité. "Spring break... Spring break for ever..."
Rat
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2013

Créée

le 14 avr. 2013

Critique lue 354 fois

3 j'aime

2 commentaires

Rat

Écrit par

Critique lue 354 fois

3
2

D'autres avis sur Spring Breakers

Spring Breakers
Chaiev
5

Une saison en enfer

Est-ce par goût de la contradiction, Harmony, que tes films sont si discordants ? Ton dernier opus, comme d'habitude, grince de toute part. L'accord parfait ne t'intéresse pas, on dirait que tu...

le 9 mars 2013

245 j'aime

74

Spring Breakers
Before-Sunrise
1

Halt Disney

Le film démarre comme un clip de MTV, avec de la musique merdique et la caméra qui tremble. Il n’y a pas de dialogue, juste des cons qui sautent à moitié à poil en buvant de la bière (yeaah on se...

le 16 mars 2013

162 j'aime

39

Spring Breakers
real_folk_blues
2

Vous êtes le maillot faible, au revoir.

Si faire rouler des culs souillés par la bière et la sueur en 120 images secondes pendant une heure trente correspondait à l’image que je me faisais de la représentation du carpe diem contemporain,...

le 13 sept. 2013

140 j'aime

79

Du même critique

Rois & Reine
Rat
2

Vive le Roi...

Ces quelques mots seront marqués sous le sceau d'une phrase primordiale : J'aimerais qu'on m'explique. Il est des instants, tantôt grandioses, tantôt méprisables durant lesquels je me sens tel un...

Par

le 29 mai 2014

7 j'aime

3

Mauvais sang
Rat
7

Critique de Mauvais sang par Rat

Chaque film de l’inespéré Carax est une symphonie. Une partition risquée et délirante sur laquelle les notes volent dans tous les sens. Il clame amour et humanité. Sa technique est brute et très...

Par

le 24 mars 2013

6 j'aime

Outrages
Rat
2

Critique de Outrages par Rat

Ouh là là. Que c’est mauvais. J’espère que quelqu’un a déjà réagi contre cette doxa qui porte Brian de Palma aux nues. Ce n’est pas un bon cinéaste, tout simplement. Direction d’acteurs, dialogues,...

Par

le 23 mars 2013

4 j'aime

5