Une saison en enfer
Est-ce par goût de la contradiction, Harmony, que tes films sont si discordants ? Ton dernier opus, comme d'habitude, grince de toute part. L'accord parfait ne t'intéresse pas, on dirait que tu...
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Est-ce par goût de la contradiction, Harmony, que tes films sont si discordants ? Ton dernier opus, comme d'habitude, grince de toute part. L'accord parfait ne t'intéresse pas, on dirait que tu essayes de réunir en une seule gerbe des notes forcément incompatibles pour que le nuage d'harmoniques qui s'en échappe soit le plus cacophonique possible.
Ton Spring Breakers est une bizarre partition. Dès qu'on en pense quelque chose, un détail vient contredire la première impression. C'est un film autiste, mais qui passe son temps à essayer d'accrocher le spectateur, ne serait-ce qu'en l'exaspérant. C'est un film idiot, mais qui agence ses diverses couches avec une intelligence aiguë. C'est un film tonitruant, mais qui ne parle que de silence et de mort.
Plutôt que de nous raconter une histoire rectiligne, tu pars dans tous les sens, en nappe. Jouant en expert du montage visuel et sonore, ta virée dans le cauchemar du spring break fait du sur place, à force de répétition, de flash forward et backward. Comme si le narrateur était omniscient, ou bloqué à jamais dans le temps. Il est stone, et fait tout pour nous refiler sa came. Tu nous montres jusqu'à la nausée ces corps, ces frottements, ces débordements qui n'ont j'imagine d'intérêt que si on les vit, pas si on les voit. Jusqu'à la nausée oui, alors que tout ça ne vaut que pour dire que tes héroïnes (c'est drôle ce nom de drogue, pour une fois ça colle à ravir) s'en foutent bien elles aussi de ces pauvres fêtes de débiles en chaleur. Les vrais enfers on n'y flotte pas, on y descend. Dont acte.
Reste que tout cela a un prix qui se paie : ton film est d'après coup. Comme dit Faith, "ça nous fera des souvenirs", oui plus tard. Mais sur le moment c'est à la limite du supportable. Comme une fête où tout le monde serait saoul sauf nous. On s'ennuie, on voudrait partir, en même temps on est happé, fasciné par le vide de ces tribus sans âmes, d'une fascination à son tour vide d'éclat ou d'intêret. C'est une étrange idée de faire des films repoussoirs. Étrange et belle : c'est si difficile d'aimer ne pas être aimé. Respect.
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le 9 mars 2013
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