Plusieurs filets rouges dégoulinent le long d'un poster mural sur lequel une très jolie jeune femme sourit triomphalement...
Le fait-divers, horriblement violent, est tout frais ! Mais on n'est pas surpris par ce dénouement sous-entendu dès le début du film. Habile et intelligent procédé de montage de la part de Bob Fosse qui, avec "Star 80", savait alors évoquer une dramatique histoire encore très présente à la mémoire de ceux et celles suivant de près l'actualité cinématographique. Celle qui s'attache aux noms de Dorothy Stratten et Paul Snider, deux êtres qui n'auraient jamais dû se rencontrer. Ce qui s'est cependant produit, pour leur malheur, dans un fast-food où elle était serveuse occasionnelle. Beau parleur, donnant l'impression d'avoir des relations dans le show-business américain, il subjugue d'emblée cette jeune beauté provinciale qui n'avait alors même pas 18 ans. En lui promettant une carrière fulgurante. Le grand jeu, quoi !
Et, effectivement, tout va aller très vite pour Dorothy. Trop vite ! Intégrée sans avoir à tirer de ficelles, hormis celles d'un maillot de bain suggestif, dans la "famille" d'Heiffner, patron de la fameuse revue "Playboy", elle dévoile ses charmes dans un numéro qui fait sensation. Mieux : elle décroche le titre enviée de Playmate de l'année 80. Celle de son triomphe... et de sa chute morbide. Son mariage d'amour avec la gloire et son union avec Paul Snider tournant très vite aux "noces de sang" !
Car lui, personnage au passé trouble, irrémédiablement minable aux yeux des autres, mais assez parano-mégalo pour se croire un impresario de génie, n'acceptera pas d'être tenu à l'écart des grands débuts artistiques de celle qu'il a découverte. La liaison de Dorothy avec le metteur en scène lui offrant son premier rôle important va être le détonateur. En août 80, lors d'une ultime tentative pour la récupérer, il la tue puis se suicide, dans un bain de sang !
Dorothy Stratten venait à peine d'avoir 20 ans !
Bob Fosse, dont chaque film est une plongée décapante et dérangeante dans le monde du spectacle, pas aussi rose et lisse qu"on le laisse croire, jette donc une nouvelle fois un regard très acéré sur une réalité nettement pernicieuse par certains aspects. Le côté miroir aux alouettes illustré on ne peut plus crûment par l'environnement "Playboy", vu hélas par des milliers de jeunes femmes comme le meilleur tremplin pour débuter une carrière. Et puis, il y a surtout ce milieu - on est assez tenté de l'écrire avec un M ! - du Cinéma à nul autre pareil en broyant des personnalités trop vulnérables. En visionnant ce film, impossible de ne pas penser à Marilyn Monroe, à l'irremplaçable Patrick Dewaere, entres autres.
Mariel Hemingway (soeur de Margaut), qui s'est battue pour décrocher le rôle phare, dévoile une plastique parfaite... Mais un talent encore balbutiant ! Depuis, sa carrière a bégayé !
Quant à Eric Roberts (frère de...), il restitue avec brio toute l'ambiguïté mi-pitoyable mi-exaspérante de Paul Snider.
Celui qui a fait sonner le glas (petite pensée pour Ernest !) du malheur !