L'origine de la prélogie remonte au tout début de la trilogie originale. Alors que George Lucas écrivait le scénario de Star Wars, Episode IV : A New Hope, il s'est vite rendu compte que son histoire était bien trop complexe et vaste pour tenir dans un seul film. Il disposait ainsi de la matière suffisante pour tenir sur plusieurs suites en cas de succès du premier opus. George Lucas se met donc à construire le scénario du deuxième film, Star Wars, Episode V : The Empire Strikes Back, avec l'idée de génie de bouleverser la saga toute entière. Il fait de Dark Vador le père de Luke Skywalker et développe ainsi, dans un synopsis de seize pages, le passé du Sith noir et notamment son parcours initiatique de chevalier Jedi Anakin Skywalker jusqu'à sa bascule dans le côté obscur de la Force devenant Dark Vador. George Lucas a, dès lors, dans les mains une nouvelle trilogie. Mieux encore, il voit plus grand avec une trilogie se passant après celle qu'il est en train de construire. George Lucas veut ainsi raconter l'histoire de trois générations de Skywalker !
Après avoir perdu une partie de sa fortune à la suite de son divorce en 1983, George Lucas n'a plus envie de revenir sur Star Wars. Officieusement, il a abandonné l'idée de faire une suite à la trilogie, c'est-à-dire de produire les épisodes VII à IX. Par contre, il reste toujours fasciné par le passé de Dark Vador, mais il met l'idée de s'y consacrer en suspens. L'année 1991 change alors la donne. Star Wars a un regain de popularité grâce aux séries de comics de Dark Horse et aux romans de Timothy Zahn, cela pose déjà les bases de ce qui sera appelé par la suite l'Univers Étendu. Au cinéma, en 1993, la société d'effets spéciaux Industrial Light & Magic, créée par George Lucas, fait elle aussi un travail remarquable et remarqué sur le film de Steven Spielberg, Jurassic Park en créant des dinosaures plus vrais que nature à l'aide de l'imagerie numérique. Tout cela finit de convaincre George Lucas que la technologie est enfin prête pour la vision qu'il a de sa prélogie. Il commence alors officiellement à travailler sur le script le 1er novembre 1994.
George Lucas décide donc de se concentrer sur le passé de Anakin en faisant de lui le personnage principal de son intrigue, et non en se focalisant sur Obi-Wan Kenobi comme il pensait le faire durant un temps. Ainsi, il veut créer une saga unifiée qui raconte la vie de Anakin Skywalker de sa jeunesse à sa mort. George Lucas va également se permettre d'introduire des éléments qu'il n'avait pas eu le temps ou la possibilité d'exploiter lors des précédents opus, et notamment le principe de la Force en la faisant reposer sur les midi-chloriens. Présents dans tous les êtres vivants, leur taux déterminerait la réceptivité de l'individu à la Force et donc la capacité de chacun à devenir un Jedi. Un autre pan va être aussi largement développé par George Lucas : l'aspect politique de l'Ancienne République. Dès le début du film, on parle de litige commercial, d'embargo, de pourparlers, de motion de censure. Ici, le mal est insidieux et caché, parfaitement en adéquation avec le titre de l'opus : Star Wars, Episode I : The Phantom Menace.
Le film contient d'ailleurs deux autres atouts narratifs. Le premier est l'incroyable richesse et la diversité des cultures de l'Ancienne République. De par la beauté des décors, des architectures, des différentes races extra-terrestres au sein du Sénat, le spectateur se rend compte que les mille ans de paix ont permis l'expansion sans précédent des arts et de la culture en général. Furtivement, on peut apercevoir plusieurs E.T., l'extraterrestre culte de Steven Spielberg dans une nacelle du Sénat, il y a aussi Warwick Davis, qui incarne Wicket, l'Ewok amoureux de la Princesse Leïa dans les tribunes de la course de pod, ou encore un homme habillé comme Indiana Jones dans cette même course de pod.
L'autre atout se retrouve dans l'envie de symétrie de George Lucas. Ce premier épisode ressemble ainsi beaucoup au sixième, Star Wars, Episode VI : Return of the Jedi. Comme lui, le film est le plus léger des trois films de la nouvelle trilogie. Comme lui, il se finit par une fanfare. Et enfin, comme lui, il connait l'incinération d'un Jedi en toute fin. Les deux possèdent, en outre, des personnages mignons, plus dirigés vers le public des enfants : Jar Jar Binks et les Gungans d'un côté, Wicket et les Ewoks dans l'autre. En fait, tout ceci montre que ce premier épisode de la prélogie est un film totalement cohérent dans la saga Star Wars et non bâclé comme certains fans ou critiques le prétendent.
Anakin Skywalker n'est pas encore le Sith Dark Vador mais un jeune esclave de neuf ans originaire de la planète Tatooine. Sa mère ne s'explique pas sa conception, ne lui connaissant aucun père potentiel. Le garçon est de fait un génie du pilotage mais aussi de la mécanique. Et il ne rêve que d'une chose : être affranchi et devenir un chevalier Jedi. La chose est possible grâce à son taux de midi-chloriens, le plus élevé de la galaxie, le rendant apte à ressentir la Force. Et s'il était l'élu capable de ramener l'équilibre dans la Force ? Le jeune Jake Lloyd a donc la lourde tâche de jouer le jeune Dark Vador. Il s'en sort relativement bien donnant au garçon une énergie et un optimisme communicatif, loin de la noirceur qui envahira plus tard le personnage. Le voir enfant, empli de rêves et d'espoirs, rend, en effet, encore plus tragique la destinée qui sera la sienne.
Ewan McGregor relève, quant à lui, le défi de reprendre le rôle de Alec Guinness pour interpréter le jeune Obi-Wan Kenobi. Ce n'est alors qu'un jeune Padawan, un Jedi en formation. Il suit son maître Qui-Gon Jinn afin d'apprendre auprès de lui tout ce qu'il doit savoir interprété par Liam Neeson. Obi-Wan se caractérise d'ailleurs par bien plus de sagesse que son propre maître qui s'avère plus téméraire. Dans cet épisode, Obi-Wan Kenobi est un personnage relativement effacé même si il prend de l'assurance au fur et à mesure du récit. Qui-Gon, lui, est un Jedi qui refuse de rentrer dans le rang et a des idées arrêtées sur la Force. Ce constat fait, il n'est donc pas étonnant que ce soit lui qui découvre le potentiel du jeune Anakin. Il est même persuadé qu'il est l'Elu de la prophétie et veut absolument le former à devenir un Jedi malgré l'âge avancé du garçon et le fait qu'il ait déjà sous son aile un Padawan.
La Reine de Naboo, Padmé Amidala, est, quant à elle, âgée de 14 ans. Elle est élue afin de représenter son peuple et le protéger en toutes circonstances. Natalie Portman campe à merveille ce personnage tout en prestance, volonté et compassion. Elle est à la fois touchante dans sa relation avec Anakin et forte dans le conflit qui oppose Naboo à la Fédération du Commerce.
Ian McDiarmid reprend son rôle de Palpatine / Dark Sidious, seize ans plus tard après Star Wars, Episode VI : Return of the Jedi. Il livre ici une performance tout simplement incroyable, en créant assurément un des personnages les plus intéressants du film, voire de la prélogie toute entière. Il est jouissif de voir comment le personnage ruse pour jouer sur les deux tableaux surtout pour le fan qui connait sa véritable identité. Seul le néophyte (comme moi, à l’époque) commençant la saga Star Wars par ce film, tombera dans le panneau de la perfidie du Seigneur Sith qui se cache sous l'apparence d'un Sénateur respectable, représentant de la petite planète isolée de Naboo. Son disciple : Dark Maul, est une autre superbe création. Le jeune Sith a une présence incroyable. Son double sabre laser, et son style de combat proche des arts martiaux font qu'il rayonne littéralement dès qu'il apparait à l'écran. Son combat final contre Qui-Gon et Obi-Wan est sans conteste l'un des moments forts du film. C'est le cascadeur Ray Park qui incarne lui-même le personnage.
Si le désir ne manquait plus à George Lucas pour poursuivre l'expérience Star Wars, les progrès techniques fulgurants observés les années le précédant ont aussi largement contribué à l'acte de naissance de la prélogie. Industrial Light & Magic a en effet livré durant les années 90 à travers des films comme Jurassic Park de sublimes effets spéciaux. George Lucas est désormais convaincu que sa filiale est à même de mettre en place toutes les envies qu'il a pour son film que ce soit pour les décors ou les créatures. Il compte d'ailleurs bien utiliser l'imagerie virtuelle pour ne donner aucune limite à son imagination. Si le film est objectivement d'une grande beauté, nombreux sont les fans à détester son aspect tout numérique là où la trilogie originale n'utilisait que les effets spéciaux mécaniques. Mais voilà, c'est méconnaitre la volonté de George Lucas qui veut faire tendre sa saga vers cette apparence. Il va d'ailleurs jusqu'à modifier ses premiers films pour ajouter des effets numériques histoire d'uniformiser le tout.
A titre de contre exemple, la planète ville de Coruscant est tout simplement superbe ou encore les étendues désertiques lors de la génialissime course de pod sur Tatooine. De même, les créatures extraterrestres ne sont pas en reste et sont aussi réussies et bien plus variées que dans la trilogie originelle.
Si il y a un élément où tout le monde est tombé d'accord, critique, fan comme public lambda, c'est assurément la merveilleuse musique de John Williams. Le compositeur reprend donc son rôle comme il l'avait fait pour la trilogie originelle et propose, une nouvelle fois, une partition de toute beauté. Il délaisse ici les musiques à consonance militaire qui représentaient l'Empire pour des musiques plus mystiques comme celle illustrant le duel entre Dark Maul et les deux Jedi. Le morceau Duel of the Fates utilise en effet une chorale pour restituer un aspect religieux au combat et s'impose depuis comme l'un des meilleurs airs de la saga toute entière. Mention spéciale également au final très enjoué du morceau Augie's Great Municipal Band qui termine le film sur une note plein d'espoir pour conclure sur la fanfare mythique de Star Wars.
Malgré ses indéniables qualités, le film est accueilli très fraichement par la critique dont toutes les voix regrettent de ne pas retrouver la magie de la première trilogie. Il est aussi reproché à George Lucas de ne pas avoir fait le même type de film et d'aborder des thèmes à la fois trop complexes et trop enfantins. Pourtant le film bat de nombreux records au box-office, à commencer par celui de la meilleure première journée, mais aussi celui du film atteignant le plus vite les 100.000.000$ ; il fait de même pour les barres des 200 et 300 pour atteindre un cumul de 983.00.000$ devenant le film ayant le plus rapporté en 1999.
Star Wars, Episode I : The Phantom Menace est un des épisodes de la saga le plus mal aimé par les critiques et par les fans a sa sortie. Sans être objectivement le plus réussi, le film n’a pas à rougir de son état. Il est au final très cohérent avec le reste des épisodes mais pose surtout de solides bases pour la suite. Son esthétique, même si elle ne fait pas l'unanimité, est intéressante et indéniablement très belle. Ce premier épisode se doit d'être réhabilité car il offre un voyage bien plus profond que certains font mine de négliger : il convient pour l'apprécier à sa juste valeur d'accepter son statut d'œuvre sociale et politique, là où ses pairs étaient eux mystiques et militaires.