Star Tour - Episode IX
Ça y est. C’est fini. Le verdict est définitivement tombé désormais. Le côté obscur de la force l’a emporté. L’Empire Disney a triomphé. Certes c’était attendu. C’était écrit. Le retour de J. J...
le 18 déc. 2019
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Cette critique dévoile quelques petits moments de l'intrigue, mais normalement, rien d'essentiel.
L’Empereur (Ian McDarmid) est de retour ! Il n’a toujours pas renoncé à son plan de conquête de la galaxie, et la pièce ultime de ce plan est Kylo Ren (Adam Driver). En effet, il met à sa disposition la plus grande flotte de destroyers jamais créée, afin qu’il acquière enfin la puissance qui permettra au côté obscur de dominer le monde interstellaire. Mais dans l’ombre, la Résistance n’a pas dit son dernier mot…
Ce qui est beau, avec cette trilogie, c’est qu’elle aura fini comme elle avait commencé : en divisant les spectateurs. Que ceux qui accusent Abrams d’avoir initié un trio de films plats et sans saveurs y réfléchissent : leur réaction (d’une virulence parfois ahurissante) prouve le contraire. Que les choix scénaristiques adoptés par ces trois films soient remis en cause par une partie du public montre bien combien cette nouvelle histoire avait quelque chose de nouveau à dire. S’il est vrai qu’on peut (largement) trouver à y redire, tous devraient convenir qu’Abrams a atteint son but.
Il est toutefois très difficile à quiconque de parler de manière neutre de cet épisode IX, tant celui-ci est absolument dépendant de la relation de tout spectateur à la saga Star Wars. Pour l’auteur de ces lignes, il faut donc commencer par dire que Star Wars n’a jamais rien eu de sacré à ses yeux. Si la saga des étoiles a toujours été un excellent divertissement, et nous a offerts – après tout – de grands films, de par son caractère novateur et fondateur, on peut faire, sur le fond, tous les reproches du monde à ses meilleurs films, sans risquer de susciter l’ire de votre humble serviteur.
Que la plupart des Star Wars sont des chefs-d’œuvre de narration et de grand spectacle est assez indéniable, mais pourtant, aucun ne peut réellement se vanter d’apporter au spectateur une réflexion intense. Tout au plus pourra-t-on essayer d’en tirer quelques généralités sur l’héritage familial et la persévérance de l’héroïsme (ce qui n’est déjà pas si mal). Le divertissement est néanmoins l’unique excuse que l’on peut trouver à ses dérives panthéistes et à son concept un peu délirant de Force, qui ne doit être considéré comme autre chose qu’un outil scénaristique pratique, en tous cas pour qui veut garder un minimum de crédibilité.
Or, il se trouve que le divertissement a toujours été la devise de J.J. Abrams qui, s’il n’a jamais été un grand réalisateur (en tous cas, pour l’instant), s’est déjà révélé plus d’une fois un grand faiseur d’images. Ses Star Trek, mais surtout son grandiose Star Wars VII en constituaient une preuve mathématique. Qu’on l’aime ou non, force est de reconnaître que Star Wars IX en est une autre.
Rarement le génie d’Abrams n’aura été aussi perceptible qu’au travers des scènes d’action absolument dantesques qu’il nous offre ici sur un plateau en or. Enchaînant les morceaux de bravoure à un rythme plus qu’effréné, Star Wars IX est un film-somme. On y trouve tout à la fois du Alien (les scènes avec l’empereur), du Harry Potter (la scène du serpent géant), du Star Trek (lien évident pour l’ambiance générale), du Hobbit (la ville de Kijimi), du film de pirates (les scènes sur Pasaana) et du film de guerre (la base de la Résistance). En cela, impossible d’affirmer que Star Wars IX trahit l’essence de la saga : à ce niveau, il est sans doute le plus pur héritier du film original de Lucas.
S’appuyant sur des effets spéciaux mille fois supérieurs à tout ce qu’on trouve ailleurs (qu’on repense au sinistre Avengers : Endgame sorti la même année), et bénéficiant d’une photographie comme toujours exceptionnelle, signée Dan Mindel, Star Wars IX nous offre ainsi un des spectacles les plus propres de la décennie. Porté par les notes épiques de la bande-originale de John Williams, toujours au sommet (le retour du thème fondateur de la saga occasionne une des plus grandes scènes de la nouvelle trilogie), cet épisode final a peut-être tous les défauts, mais pas celui de la mesquinerie. D’une générosité inconcevable, il donne à tous les blockbusters contemporains une leçon grandiose de mise en scène.
On pourra légitimement trouver que le film d’Abrams dépasse d’ailleurs le stade de la générosité pour passer de plain-pied dans celui de l’outrance, et on n’aura pas tort. Mais avant de reprocher quelque défaut que ce soit à un film, il faut se poser la question de la volonté qui se trouve derrière. Et à moins de faire preuve de mauvaise foi, force est de reconnaître que cette outrance est voulue et assumée par Abrams. Si l’artiste n’est pas en accord avec la totalité de son public, il est au moins en accord avec lui-même, et somme toute, c’est peut-être le plus important.
Héritier fidèle d’une saga qui s’agrandit d’année en année, Star Wars IX a en outre la délicate mission de fermer le récit familial et la saga originelle, sans pour autant fermer l’univers narratif. S’il ne s’acquitte pas toujours de cette mission avec la plus grande subtilité, il sait en outre parler au cœur de ceux à qui cet univers est cher : J.J. Abrams a ainsi convoqué tous les personnages possibles et imaginables (formidable caméo d’Harrison Ford) pour leur dire un dernier adieu, tandis qu’il s’amuse à glisser un nombre incalculable d’éléments empruntés aux films précédents, non sans une certaine malice (tiens, coucou, les Ewoks !), allant jusqu’à convoquer à nouveau Luke et Leia jeunes, le temps d’une micro-scène. Pourtant, en véritable passionné qu’il est, le réalisateur effectue tous ces clins d’œil avec un respect qui force l’admiration, sans jamais trahir le substrat de son récit.
Après avoir reculé jusqu’à la dernière extrémité, il nous reste donc à aborder le sujet qui fâche : le scénario. Là, il faut bien avouer que si les idées sont là, la mise en œuvre n’est pas toujours d’une décoiffante subtilité. Quand, pour révéler la véritable identité d’un espion, on fait dire au personnage en question : « C’est moi l’espion ! » frontalement, et sans autre préambule, on peut juger que le seuil de la subtilité a été allègrement franchi, et dans le mauvais sens.
En fait, Abrams a fait face à la dure tâche de concilier les bases posées par l’épisode VII et celles posées par l’épisode VIII, souvent sur les ruines fumantes du VII, précisément. Le miracle, c’est qu’il y arrive plutôt bien ! Le défaut inhérent au miracle, c’est qu’il perd ainsi une grande partie de son public. La découverte à chaud des différents retournements du film frôle le scandale, tant cela paraît gros et complètement idiot. La réflexion postérieure leur est toutefois favorable, quand on se dit qu’en fait, tout cela n’est pas si incohérent, et même parfois très logique.
Ainsi, la relation Kylo Ren/Rey est parfaitement exploitée, constituant le principal point fort du film (malgré la fin en mode Belle au bois dormant, complètement à côté de la plaque). Ce qui pêche davantage, c’est le sort de tous les autres personnages : qu’il crée un faux suspense sur la mort supposée de Chewbacca ou de C3-PO, dont on sait pertinemment qu’elle sera fausse, ou qu’il essaye de créer une intrigue autour de Finn, alors qu’en réalité, ce personnage ne peut avoir intrinsèquement aucun intérêt narratif, le film d’Abrams peine à construire sur le sable des épisodes précédents. Les idées sont (parfois) bonnes, mais il aurait fallu les égrener au gré d’une trilogie plus cohérente plutôt que de rassembler trois films en un.
Impossible donc, pour ce neuvième épisode, de ne pas avoir l’air de l’épisode qui cherche à rattraper les erreurs de ses prédécesseurs. Inévitablement, cela devait arriver. Cela est arrivé.
S’appuyant sur des personnages transparents, la dynamique narrative de Star Wars IX essaye de leur donner l’épaisseur qu’ils méritaient mais c’est trop tard : on se fiche complètement de Poe Dameron ou de Finn (dont on oublie l’existence entre chaque scène), tout ce qui compte, c’est la seule chose que les épisodes ont essayé d’installer, à savoir Rey et Kylo Ren, d’autant que leurs deux interprètes écrasent tous les autres nouveaux personnages.
S’ingéniant à détruire ce que l’épisode VIII avait essayé de construire (c’est de bonne guerre, puisque c’est ce que le VIII avait fait avec le VII), cet épisode IX a un peu trop tendance à désamorcer par l’humour ce qui aurait pu être traité avec une réelle gravité. Aussi, quand la gravité arrive bel et bien, c’est trop tard : l’émotion s’est définitivement enfuie.
Mais ne nous le cachons pas : en-dehors des insupportables pisse-froids qui se concentreront sur les quelques ratés narratifs du film, félicitant leur propre ego d’avoir su anticiper l’évidence la plus absolue, il ne sera pas difficile aux spectateurs de bonne volonté de trouver leur plaisir dans le divertissement titanesque, d’une générosité inimaginable, que constitue cet épisode IX.
Rarement un épisode de Star Wars aura proposé un divertissement aussi total que cet opus final. Massacrant une partie de ses personnages et de son scénario au profit du grand spectacle, Abrams assume ses choix scénaristiques comme visuels, en adoptant une direction artistique réellement hors du commun, qui donne une identité toute particulière à cet épisode.
Et finalement, l’on en vient à se dire qu’au-delà de ses erreurs, Star Wars IX se montre un des plus beaux héritiers du cinéma de Lucas. Car peu de réalisateurs peuvent se vanter d’avoir su à ce point projeter leur spectateur dans un ailleurs aussi fabuleux, d’avoir rapproché à ce point les hommes et les étoiles.
Désormais, il n’y a plus qu’à tendre la main, et ce que l’on rencontrera au toucher ne sera pas un simple écran froid et plat, mais un infini lumineux dans lequel on n’a plus qu’une envie : se perdre sans espoir de retour…
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le 24 déc. 2019
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