Si l'épisode VII avait divisé son public, entre ceux appréciant ses qualités cinématographiques, et ceux critiquant son académisme et sa manque de prise de risque, Rian Johnson choisit ici le chemin inverse. "The Last Jedi" est un pratiquement un camouflet à "The Force Awakens", voire à la franchise toute entière. Débutant par une intrigue qui semble similaire à "The Empire Strike Back" (les rebelles, découverts par le Premier Ordre, doivent fuir), le film trouve rapidement sa propre identité, se limitant à quelques références visuelles ou scénaristique à la trilogie d'origine.
Le scénario propose de nombreuses audaces, qui vont des retournements surprenants, au renouvellement des mythes de la franchise (les pouvoirs jedi, notamment), en passant par quelques maladresses (la séquence "Superman" de Leïa est d'un goût discutable...). Le mot d'ordre semble être de faire table rase du passé, thème repris à travers plusieurs personnages très bien traités : le tourmenté Kylo Ren (convaincant Adam Driver) est plus mûr et plus complexe, et cherche à se libérer de son héritage, la battante Rey (charismatique Daisy Ridley) tente de se former malgré son questionnement sur sa parenté, et on l'on découvre avec grand plaisir un Luke Skywalker bougon et plein de remords, joué avec grande classe par Mark Hamill.
Mais l'intrigue évoque également quelques sujets peu abordés auparavant : le coût humain de la rébellion (arc narratif entre la tête brulée incarnée par Oscar Isaac et la sage Carrie Fisher dans son dernier rôle), ou son financement (arc narratif d'un intérêt plus discutable avec le personnage de John Boyega). Question mise en scène, si le manque de combat au sabre laser en décevra certains, les batailles spatiales demeurent sympathiques.
Et côté visuel, Rian Johnson apporte plusieurs scènes marquantes (le mélange de rouge et blanc sur Crait...) voire touchantes (la scène finale). On apprécie également les quelques nouvelles compositions de John Williams, et un humour ponctuel mais agréable. En somme, avec ses choix osés et ses quelques longueurs, "The Last Jedi" divisera son public (et surtout les fans), mais il demeure un jolie objet cinématographique, et un renouvellement bienvenu.