Grace est une jeune éducatrice dans un foyer de réinsertion pour enfants en difficulté. Cela va s’en dire que States of Grace ne révolutionnera pas le genre du cinéma indépendant américain s’appropriant sa douce jeunesse un brin écorchée vive. Pas de surréalisme à la Gregg Araki ou Harmony Korine, pas de réalisme sexué à la Larry Clark dans States of Grace, juste un assemblage de traumas qui collent à la peau incarné brillamment par de jeunes acteurs en devenir. Le film décide de jouer la carte de la sincérité et de la simplicité, s’écartant d’avantage de la lourdeur de piteux films comme Detachment. Le film est un peu à l’image de son actrice, Brie Larson, rayonnante de naturelle, de douceur téméraire. States of Grace suit une destinée qui lui est propre, quoiqu’un peu prévisible dans son approche avec ses situations habituelles de calmes et de tempêtes psychologiques, sa narration jamais marginale, qui s’apparente plus à un teenage movie comme pouvait l’être dernièrement Le monde de Charlie. Malgré cet écueil un peu balisé, il y a quelque chose qui fonctionne dans l’œuvre de Cretton, une atmosphère à la fois familiale et apaisante, mais toujours sur la corde raide.
Sa mise en scène au grain d’image un peu acre comme le faisait Sean Durkin dans Martha Marcy May Marlene, sa bande son qui sonne bien au coin du feu. Malgré son accumulation de mauvais souvenirs, States of Grace ne surenchérit jamais sa noirceur. Pas de complaisance ici, seulement une caméra qui regarde avec distance et empathie des destins fissurés. Dès les premières minutes où Mason nous raconte son histoire pittoresque lorsqu’un beau jour il s’est chié dans le froc à cause de tacos, le naturel que dégage le film brille de mille feux. Nous ne sommes pas en présence d’acteurs, mais d’une réelle famille, d’une réelle communauté qui vit, il existe un réel effet de groupes dont le cœur bat parfois lentement puis éclate lors de fulgurances émouvantes telles qu’un simple rap improvisé dans une chambre qui en devient un réel moment de bravoure indécelable.
De petites scènes de coloriages ou de rasage de cheveux deviennent de petits éclats dans un ciel obscurci. Bien évidemment, l’héroïne du film, Grace, connait elle aussi ses petits moments de doutes (sa grossesse), sa détresse (son père). Toutes ses faiblesses resurgiront notamment quand une nouvelle adolescente arrivera dans le foyer, dans laquelle elle s’identifiera comme dans un livre ouvert. States of Grace est un petit film sans ambition, qui ne triche pas, laissant s’appesantir cette tension sourde. L’œuvre prend le pouls de son environnement, préfère rester ancré au simple quotidien plutôt que de s’ensevelir sous la métaphore ou le symbolisme lourdingue. A l’image de la dernière anecdote concernant Marcus, States of Grace respire un espoir amusant.