Un vagin gore doué d'intelligence
SUBCONSCIOUS CRUELTY
(Canada / 2000)
Réalisation, scénario, photo, montage : Karim Hussain (& Mitch Davis)
Production : Mitch Davis
Musique : Teruhiko Suzuki
Avec : Brea Asher, Ivaylo Founev, Eric Pettigrew, Christopher Piggins
Attention ! Film exigeant. Exigeant d'abord car il est non narratif, exigeant de par ses prises de position nettes et tranchées et parce qu'un cerveau endormi se fera débouter par manque d'attention.
C'est un film qui réclame du recul, une réflexion. Ce n'est pas un produit de consommation de masse vite vu, vite oublié. Des images très soignées au discours intelligent, la subversion est toujours présente, piquante, acérée, vivement anti-cléricale.
Karim Hussain nous propose de détruire le côté gauche du cerveau, c'est-à-dire la raison, la logique, le carcan de la morale, et de libérer pleinement l'hémisphère droit qui, lui, contiendrait la créativité, le rêve, l'imagination ; l'antre des sentiments. Ceci en quatre segments rejoints entre eux thématiquement, sans réelle transition.
L'absence, le plus possible, de repères diégétiques renforce l'absorption dans les univers mentaux des différents protagonistes et de leur mise en situation. Subconscious cruelty est un film qui prend son temps, qui fonctionne comme un rêve. La musique, bien qu'un peu datée, contre-balance ou stresse le spectateur aux bons moments. Je mettrai un bémol sur le début du troisième segment un peu trop clipesque, même dans sa mise en images et sur le stéréotype un peu grossier.
A par ce très léger point noir relativement court, tout, de la réalisation jamais redondante aux propos extrêmes intelligemment développés, est réussi. Les symboles, psychanalytiques, religieux, sexuels, sont présents mais n'étouffent pas le propos dans l'hermétisme. La lumière rappelle les plus beaux Argento avec des dominances de bleu, de rouge ou de vert. D'ailleurs l'idée de fin du premier segment appelle à notre souvenir le moyen Trauma de ce même Argento.
Relativement gore, avec des effets spéciaux plutôt réalistes malgré un budget ridicule, Subconscious cruelty choque et malmène à tous niveaux : visuellement et mentalement. L'organique est montré sans retenu. Mais ce parti pris jusqu'au boutiste est justifié par la beauté morbide du film, par son intelligence et par la rage, le doigt d'honneur levé à la face d'une société molle, bien-pensante, entravée dans sa morale puritaine.
Il se passera 6 ans du début du tournage en 1994 jusqu'à la sortie du film en 2000, les galères se succédant : censure, problèmes matériaux... Karim Hussain a 19 ans et Mitch Davis pas beaucoup plus en 1994 mais ils donneront tout pour mener ce projet à son terme.
Du jeune âge de ses créateurs, Subconscious cruelty garde une nécessité de dire, de montrer, ce truc qui sort des tripes, cette honnêteté du débutant qui fait oublier ses quelques défauts dont une certaine naïveté émergeant de la colère. Mais putain ! C'est ça qu'est bon !
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