Ce printemps 2023, à quelques semaines d’intervalle, nous arrivent d’outre-Atlantique deux jolis films argentins, portant tous deux sur l’adolescence et ses tourments ou hésitations quant à l’orientation sexuelle, l’un au masculin, ce Sublime (17 mai) de Mariano Biasin (9 janvier 1980, Buenos Aires -), l’autre au féminin, Camila sortira ce soir (7 juin) de Inés Maria Barrionuevo. Au-delà de ce point commun fondamental, chacun aborde la thématique de façon absolument singulière.
Sublime nous transporte dans une tranquille ville côtière, où un groupe de quatre jeunes garçons, camarades de classe, sont également soudés par le groupe de rock qu’ils ont fondé. Une importance de la musique qui règne aussi sur la vie du réalisateur et scénariste, lui-même musicien, mais ici accompagné par le compositeur Emilio Cervini, qui a écrit les morceaux et guidé les acteurs dans leur interprétation.
L’ambiance est calme, paisible, protégée, puisque le milieu approché est celui de la moyenne bourgeoisie et que les adolescents vivent cet âge plutôt sagement, engouffrant toute leur énergie dans l’écriture des chansons et l’exécution des morceaux. L’image d’Iván Gierasinchuk restitue magnifiquement ce climat de sérénité, baigné de soleil et adouci par l’éclat pulsé de la mer, régulièrement présente, comme espace de respiration, de ressourcement. Un tel cadre ne peut que favoriser l’éclosion des sentiments, puis accompagner leur épanouissement.
Le bel équilibre offert par le contexte et l’amitié entre les protagonistes va en effet se trouver bousculé par la prise de conscience progressive que vivra le personnage principal, Manuel (Martin Miller), concernant son attirance pour son meilleur ami, Felipe (Teo Inama Chiabrando). Dépeintes avec beaucoup de délicatesse et de sensibilité, les émotions s’accordent le temps du doute, de l’interrogation, de l’exploration, dans les relations entre les êtres mais aussi à travers certaines scènes phantasmatiques très discrètement esquissées. L’espace scolaire, et notamment les cours de Littérature, restent à l’arrière-plan mais leur rôle d’activateur, voire d’inspirateur, est très finement mis en lumière. Autre activateur, la musique, bien sûr, son rythme, ses paroles, son intensité pulsionnelle, qui avivent les sentiments, les désirs, les complicités.
Mariano Biasin signe un premier long-métrage profondément vivant, dans lequel les peines et les frustrations rencontrées se résorbent dans la beauté du monde.