Vous êtes en 2000. La séquence d'intro du jeu que vous venez de lancer sur votre PS2 toute neuve démarre et... wow c'est joli ! On ne voit presque pas de pixels, c'est impressionnant ! Voilà un bel investissement.
Une blonde un peu gamine mais bien roulée défonce les boss les uns après les autres. On passe d'un univers à l'autre, vraiment ce jeu a l'air bien...
Bon elle s'éternise cette vidéo d'intro... y'a pas moyen de passer ? TRIANGLE ? Non rien... CARRÉ ? Que dalle...
Alors ça continue.
Des dialogues, un peu foireux mais pas dégueus pour un jeu vidéo, s'égrainent doucement et vous comprenez que l'héroïne doit récupérer quelques items pour se libérer de sa prison : un hôpital ou un bordel selon les variantes de son imaginaire.
Car en fait c'est de cela qu'il s'agit : d'imaginaire. Le terrain de jeu de la jeune fille, ou le votre, peut se déployer sous diverses formes plus ou moins déviantes, il n'a « que le ciel pour limite » comme disent les ricains.
La cinématique se termine sur un message vous disant que c'est à vous de jouer : plus qu'à appuyer sur START ! Vous réalisez alors que ce n'était pas un jeu, mais un film. Vous n'êtes pas en 2000 sur Playstation 2, mais en 2011, au cinéma... devant Sucker Punch.
Pendant 1h40, le film n'a rien construit : pas un seul morceau de récit, pas un seul personnage, pas un enjeu. Pendant 1h40 il s'est contenté d'exposer en vrac l'imaginaire de Snyder ; un truc baveux et inconsistant, moche comme du Robert Rodriguez et pompé à droite à gauche. Peut-être s'agit-il d'ailleurs d'un imaginaire collectif, partagé. L'émanation d'une culture ?
En l'absence de substance, c'est donc à nous de trouver un sens, de gonfler la baudruche qui nous a été servie à grands coups de constructions mentales. Si l'imaginaire conduit à la folie alors l'imaginaire est-il le mal ? Mais si l'imaginaire est la clef permettant d'échapper à la folie, alors n'est-ce pas la première chose à préserver ? Cette fille est-elle folle de vouloir échapper à la réalité ? Suis-je fou de croire à la réalité ?
Or le film ne pose aucune de ces questions. En fait il ne les suscite même pas. Finalement, Sucker Punch est au cinéma ce que le test de Rorschach (qui s'animaient sur le visage du personnage du même nom dans Watchmen) est à l'art, chacun peut y voir ce qu'il souhaite. Personnellement, j'opte pour une tâche.