Au fur et à mesure que le temps passe, le cinéma évolue et certains genres disparaissent. Prenez par exemple le cinéma d'action à la Commando. Plus personne ne fait ça aujourd'hui (à part Stallone et ses Expendables, exception destinée à confirmer la règle). On va également préférer la fantasy à la science-fiction ou l'adaptation à la création originale.
On a également oublié ce cinéma créé par Steven Spielberg et son E.T dans les années 80 dans lequel des héros enfants vivaient des choses extraordinaires dans un univers parfaitement normal et auquel tout le monde parvenait à s'identifier.
A l'époque, pas besoin de super héros en cape pour nous faire rêver mais ces gosses à la recherche d'un trésor ou protégeant une créature venue d'ailleurs ont réussi à nous faire y croire. On pense à E.T bien sûr mais aussi aux Gremlins de Joe Dante, aux Goonies de Richard Donner, au Secret de la Pyramide de Barry Levinson. Seul Spielberg, sans doute fondateur du genre, a continué dans cette veine avec, dans une moindre mesure, des films comme La Guerre des Mondes ou Jurassic Park.
Et comme Stallone a voulu faire revivre le cinéma d'action, c'est ce genre-là de film que J.J Abrams a voulu réaliser en 2011. Et il s'en sort brillamment.
Le réalisateur de Star Trek est bien connu pour piocher ses idées chez les autres et pour ne travailler que sur des univers déjà existants. Ici, il le fait en l'assumant (et se contente d'ajouter à une réalisation rappelant beaucoup Spielberg ses fameuses touches de lumières, comme dans les aventures de l'Enterprise).
Super 8 s'inscrit parfaitement dans la veine dont je vous parlais plus haut et le réalisateur se sert dans les précédentes productions du genre. Il y parvient heureusement sans donner l'impression au spectateur de voir une caricature.
Super 8 nous rappelle juste qu'on est en terrain connu, en plein dans les années 80, quand Internet n'existait pas, quand les garçons préféraient grimper les toits pour aller parler aux filles à la place de MSN, quand la musique s'écoutait sur d'énormes Walkman de la taille d'un livre et quand le vélo BMX était encore à la mode.
C'est dans cette bonne ambiance 80s qu'une bande de gamins décide donc de tourner un court métrage en Super 8, et de notamment se faire dérouler une scène au bord de la voie ferrée. Ils vont assister là à une incroyable scène de déraillage de train, un truc complétement fou qui scotchera le spectateur sur son siège.
Mais le spectateur aura surtout l'occasion de découvrir à quel point le casting de ces gamins est absolument parfait. Joel Courtney, le héros, tient largement la comparaison avec un Henry Thomas ou un Sean Astin et est vite suivi par Elle Fanning (la jeune soeur de Dakota). On leur souhaite beaucoup de réussite tant ils sont bons et portent le film de bout en bout.
Je ne vais pas trop en faire sur l'histoire pour ne pas la déflorer mais le rythme est bon. Comme dans les vieux films dont il s'inspire, Super 8 ne développe pas particulièrement de background pour ses personnages (en dehors de Joe et d'Alice, on ne sait rien de personne) mais l'ambiance et leurs interactions arrivent à les rendre extrêmement sympathiques – de même que l'histoire d'amour qui se construit nous parait toute mignonne.
Le film prend donc le temps qu'il lui faut, pour que le spectateur prenne conscience de se qui se passe et sans délaisser pour autant les gamins et la création de leur film.
On regrettera cependant une scène, une seule, carrément pompée sur La Guerre des Mondes et semblant sortir absolument de nulle part. Seule une petite phrase d'un militaire permettra de vaguement la justifier mais il est clair qu'elle n'a strictement rien à faire là.
Il y a également en fin de parcours une scène se voulant charger en émotion, rappelant que dans ce genre de film, les enfants ont toujours une longueur d'avance sur les adultes. Madeleine de Proust oblige, certains verseront une petite larme. D'autres la trouveront également de trop.
Super 8 vise donc un public, celui qui a grandi avec les Goonies, celui qui aime Spielberg, son cinéma et ses Histoires Fantastiques. J.J Abrams fait ici une très belle déclaration d'amour au cinéaste (jusqu'à imaginer le garçon comme maquettiste et tournant des courts). Ce public-là sera conquis.
Evidemment, si vous n'en faites pas partie (et que vous avez donc eu une enfance malheureuse), il y a peu de chance pour que vous vous preniez au jeu.
Pour moi, J.J Abrams prouve que le cinéma d'aventure tel que Spielberg l'a initié avec E.T peut encore vivre. Espérons que ça donne des idées à d'autres.