Shigeru's PTSD

Memento Mario

J’avais 11 ans tout mouillé. Nous étions au Multiplex du centre commercial. Mon frère et les grands avaient choisi « Alarme fatale », et moi j’avais choisi de suivre les plus jeunes pour aller voir le film de Mario… (erreur fatale, j’aurais dû l’écouteeeer - air connu)

Je pense que c’est la première fois que je suis sorti d’un film en me sentant roulé. On m’avait peu subtilement piqué une heure et demi de ma vie. Ce jour-là, j’ai compris que les films ne sont pas tous égaux. Ce jour-là s’est éveillé en moi un sens critique.

30 ans plus tard

Le jeu vidéo se trainait, il n’y a pas si longtemps encore, la réputation de terreau empoisonné impossible à déchiffrer par les producteurs avides de moula.

Après de longues années d’adaptions fainéantes, de direct-to-dvd, de bouses surréalistes et de ratages intégraux, il y a eu le sympathique "Détective Pikachu". C’était pas "Roger Rabbit », mais c’était soigné et plaisant. Ont suivi les oubliables – mais pas déshonorants – films de Sonic. 

… Et tel un anneau unique endormi depuis longtemps au fond d’une rivière de merde, le plombier moustachu a ressenti l’appel.

Mar1.0

Une chose est certaine, c’est qu’Illumination a galéré à le faire, ce film. Déjà, il leur a fallu convaincre Miyamoto qui était encore en PLS à cause du film de 1993.

Ensuite, ils ont dû traiter avec les exécutifs d’un studio Hollywoodien et les cadres de chez Nintendo pour le moindre gag, le moindre détail d’arrière-plan, le moindre poil de moustache. Fatalement, la copie finale sent le compromis, pas franchement la prise de risque. Mais est-ce surprenant ?

On ne pourra pas vraiment pointer l’histoire du doigt parce que, en toute honnêteté, les scénars des jeux ça n’a jamais été "Mulholland Drive". C’est une copie de bon élève, fidèle avec juste un petit twist « pour dire que ».

Non, le plus bel exemple de cette non prise-de-risque c’est la Bande originale qui nous balance sans crier gare des hits eighties plus rabâchés que Les lacs du Connemara en soirée étudiante.

Le tout est inoffensif, emballé en moins d’une heure et demie, et souffre d’un rythme effréné puant le boomer qui a peur de perdre l’attention des TikTok babies.

Mais sinon pourquoi t’as mis 7 ?

Eh bien parce que, passé ces défauts attendus, ça marche !

L’ensemble du film sonne comme une lettre d’amour au personnage et à son univers. Ce que certains verront comme des clins d’œil à leur enfance sera vu par d’autres comme de petites pièces d’un monde foisonnant et coloré.

Parce que le film fait sourire sans pour autant forcer le gag à toutes les secondes. Horvath et Jelenic ne se sont pas contenté d’un coup de peinture fraiche. Responsables du délirant "Teen Titans Go », ils semblent avoir trouvé ici un ton propre, une tendresse un peu perchée qui sied bien aux personnages très lisses de chez Big N.

Bref, c’est très joli, techniquement très propre. C’est un bon moment pour toute la famille.

Mais si je dois réellement chercher au fond de moi « Pourquoi 7 ? », je dirais que malgré le formatage outrancier, le film ne sent pas le cynisme. Il arrive tel un JCVD du cinéma d’animation à faire sourire tout en faisant le grand écart entre passion et obligations. Il semble avoir été fait par des gens qui veulent du bien à Mario et ses fans.

Et ça, mine de rien, ça fait du bien au gamin de 11 ans qui sortait dégouté d’un multiplex en 1993.