Bon. Pfiou. Par où commencer… Rien que le titre, tout un programme, bien plus parlant sur le contenu du film que son titre VO, Double Agent 73, puisqu’il résume à lui tout seul le scénario du film. Disons que vous voyez ces films qui vont tout miser sur leur idée de départ un peu folle, sur un concept fort, et qui vont imaginer un scénario tout autour ? Eh ben Supernichons contre Mafia, c’est exactement ça. Le concept de départ, l’actrice Chesty Morgan, de son vrai nom Liliana Wilczkowska, une polonaise qui s’est fait remarquer dans un club de striptease pour son énoOoOrme poitrine, et qui, avec la proposition de la réalisatrice Doris Wishman, a vu les sirènes d’Hollywood lui tendre les bras. Mais comme dirait un certain Amiral Ackbar : « It’s a Trap » ! On lui fait tourner dos à dos Mamell’s Story (1974) et donc Supernichons contre Mafia (1974), en recyclant les décors et le casting, avec pour mot d’ordre que sa très encombrante poitrine soit dans presque tous les plans, ses deux seuls et uniques films avant que la bougresse, sans doute dégoutée de ce qu’elle venait de faire, ne se retire du milieu du cinéma. Et donc je viens de voir Supernichons contre Mafia (je ne me lasserai jamais de ce titre) et… qu’est-ce que je viens de voir… Même en bourlinguant dans le petit milieu du nanar depuis plus de deux décennies, on n’est pas prêt pour ce spectacle… Difficile de trouver les mots…
Supernichons contre Mafia est un film qui n’a rien pour lui. On sent l’absence totale de budget. 90% des scènes sont tournées dans des appartements ou dans une voiture. C’est filmé, éclairé, et monté n’importe comment. La caméra tremble, on voit des ombres là où il ne devrait pas y en avoir, il y a des coupes à l’arrache sur la musique de fond lors des changements de plans, des stockshots sont intégrés à moitié déformés car ils n’étaient pas au même format d’image que le reste, la mise au point ne se fait pas correctement à de nombreuses reprises (donnant un effet de flou non désiré), … Sans parler d’une scène filmée à 4 images seconde histoire de donner un style. L’enchainement des scènes n’a parfois ni queue ni tête, comme s’il manquait des scènes entières (ce qui est fort possible lorsqu’on voit la durée du film, 1h13). De temps à autres, la réalisatrice semble expérimenter et le résultat se voulant « arty » est au final surtout complètement improbable. Certaines scènes sont interminables alors qu’elles auraient pu être réglées en quelques secondes. Mais que voulez-vous, quand le concept du film se limite à un agent secret bien pourvu de la tétine et qui a un appareil photo dans l’une d’elles, il faut bien meubler. Alors on a un beaucoup trop long plan sur les pieds d’un homme qui marche, un beaucoup trop long plan sur des figurants qui jouent au beach volley (dont une équipe de naturistes), de très longs plans inutiles sur des animaux lors d’une visite au zoo, … Ah, et on a même l’hommage à la scène de douche de Psychose le moins bien filmé et crédible de l’histoire du cinéma. Bordel, j’étais pas prêt.
Visuellement, Supernichons contre Mafia (mais quel titre !) est très ancré dans les années 70, aussi bien dans les décors (ces tapisseries !!! Ces rideaux !!!) que dans le look des personnages (aussi bien vêtements que coiffures). Tout le casting a un charisme proche du néant. Leur jeu est cataclysmique, et Chesty Morgan semble soit complètement droguée, soit simplement dépitée d’être là à passer son temps à montrer sa poitrine hors du commun. Sans compter que quand on voit le jeu de cette dernière, à quel point elle a l’air perdue, on voit bien qu’elle n’a d’actrice que le nom. Nous sommes ici devant un film extrêmement étrange, à mi-chemin entre la bobine d’art et d’essai et la sexploitation avec tous ces plans nichons entièrement gratuits et assumés comme tels. Sauf qu’ici, l’érotisme n’en est pas réellement tant l’énorme paire de la dame est d’une mocheté absolue, pendouillante jusqu’au nombril, se mettant sur le côté tels deux morses échoués sur la plage lorsque la demoiselle se couche. Nous sommes ici très loin de Russ Meyer par exemple, on ressent même une certaine gêne pour cette pauvre fille exhibée telle une bête de foire, comme on le faisait au début du 20ème siècle dans les freaks show. Il y a une blague pas trop jojo qui dit « Qu’est ce qu’une femme de 70 ans a de plus entre les seins qu’une femme de 20 ans ? Son nombril ». C’est le cas pour Chesty Morgan, sauf qu’elle n’a au moment du tournage que 37 ans. On est plus proche du handicap que du sex-appeal et c’est un peu triste à voir.
Certaines scènes, il faut les voir pour les croire, comme lorsqu’elle défonce des sbires à coup de nibard dans leur tête. Ou lorsqu’elle sort tout son attirail et se lève le sein gauche pour faire des photos avec l’appareil qu’on lui a implanté à l’intérieur. Le tout agrémenté d’un « clic » et d’un flash blanc pour bien informer de ce qu’elle est en train de faire. Le spectacle est tout bonnement improbable et il est décuplé par une VF absolument frappadingue, avec des doubleurs sans doute très bourrés, d’une vulgarité sans nom, générant chez le spectateur bon nombre de fous rires. En voici un petit florilège :
– Pauvre Connasse, on t’a implanté une caméra dans ton gros nichon.
– Les gueules de tous les mecs à éliminer seront enfermées dans ta boite à lolo.
– Que se passerait-il s’il te suçait le mamelon, eh bien tu aurais en souvenir la photo de ses amygdales.
– Avec des nichons pareils, on doit se régaler.
– La nature s’est gourrée, elle lui a collé les miches devant et les nichons au cul.
– J’ai plus d’un tour dans mes roberts, tu y passeras couille molle, tu n’auras même pas eu le temps de tirer un coup.
– Si j’en avais une paire comme ça, il me faudrait la culotte du zouave du pont de l’Alma.
– Y’a de quoi nourrir tout un orphelinat avec tes boites à lolos.
– Dommage, je l’aurais bien sautée cette vache laitière.
– C’est pour ça qu’on n’a pas le droit d’avoir la couille sentimentale.
La légende dit que beaucoup de ces lignes de dialogues ne sont pas dans la VO et qu’ils ont été improvisés par les doubleurs.
Supernichons contre Mafia propose exactement ce que son titre annonce. Le résultat est une catastrophe absolue proche du freaks show, jamais sexy, sans aucun talent, sauvé du naufrage total par une VF complètement folle avec des doubleurs complètement en roue libre.
Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-supernichons-contre-mafia-de-doris-wishman-1974/