Adaptation d'un roman de Deborah Levy, Swimming Home ne manquera pas d'évoquer le Théorème de Pier Paolo Pasolini ou le Visitor Q de Takashi Miike de par cette présence étrangère s’immisçant au sein d'une cellule familiale pour en perturber l'équilibre et révéler ses plus noirs secrets. Des références encombrantes dans le cas présent, le film de Justin Anderson n'ayant ni la maîtrise discursive ni la folie transgressive de ses aînés, et sombrant dans les pires travers des expériences arty poseuses.


Le long-métrage ne manque pourtant pas d'arguments sur le plan visuel, entre le grain caractéristique du 16mm, des plans savamment composés (visiblement hérités de la formation à la peinture du réalisateur), ainsi que des expérimentations sur le montage et l'ambiance sonore contribuant à installer une atmosphère d'inquiétante étrangeté. Malheureusement, l'absence de fond au niveau de l'intrigue (on est bien en peine de savoir ce que le film cherche vraiment à nous raconter), couplé à une gestion calamiteuse du rythme desservent totalement l'expérience. Swimming Home se résume ainsi à une succession hasardeuses de scènes parfois réellement hypnotiques (notamment ces scènes de danse proche de la transe) mais souvent inutiles, et l'ennui se fait plus d'une fois ressentir, quand ce n'est pas l'agacement devant la tendance au maniérisme gratuit du réalisateur. Quant au jeu d'acteur assez lunaire, oscillant entre la rigidité d'un pantin et la neurasthénie d'une endive avariée, il ne relève clairement pas l'ensemble. On sauvera tout de même la sensualité trouble et vénéneuse d'Ariane Labed, véritable point fort du film.


Swimming Home est clairement le genre d'expérience qui aurait gagnée à sortir sous forme de court ou moyen-métrage. Justin Anderson, dont c'est le premier essai, a visiblement péché par excès de confiance en voulant adapter un livre dont le contenu, apparemment très cryptique lui aussi, nécessitait de plus grandes épaules que les siennes pour en réussir la transposition cinématographique. Espérons qu'à l'avenir, il parvienne à insuffler sa patte graphique dans une mécanique plus fluide et moins portée sur l’esbroufe mal placée.

Little-John
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le 5 sept. 2024

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