Polar "à la Melville" avec José Giovanni et Claude Sautet au scénario : deux gages de qualité pour un résultat tout à fait sérieux mais peinant à faire de vraies étincelles malgré son lot de trahisons, de coups bas et revirements de situation et un "code de l'honneur" largement balancé à la poubelle.


1963, c'est le temps des séries noires à la française en cravate, costume trois pièces et gabardine, avec leurs petits bistros de quartier, leurs clubs enfumés et leurs affiches publicitaires pour Martini qui enluminent la ville. Un autre décor donc, et une autre époque où les voyous ressemblent à des PDG et où l'argot sonne comme un langage aussi fleuri que châtié.

Dans ce genre si prolifique en France dans les années 50 et 60, Symphonie pour un massacre ne dépare pas sans non plus vraiment s'imposer. Pour appuyer et bien faire passer la noirceur et le fatalisme de son point de vue, Deray opte pour la version austère et assourdie de ce modèle et se laisse parfois piéger par quelques temps étirés se transformant en coups de mou quand un Jean Rochefort sans moustache dans un rôle de truand froid et déloyal qui, si je ne me trompe, ne lui a jamais été attribué ailleurs ne m'a pas franchement emmené avec lui. La mécanique du crime ici mise en place reste cependant bien huilée. Rien que de très classique mais le charme suranné des histoires de gangsters en complet-veston peut opérer tranquillement. De crime en crime, Deray fait quelque peu monter la pression ; pas de quoi rendre l'atmosphère étouffante mais la progression de l'intrigue se déroule sans accroc jusqu'au grain de sable tant attendu qui lui ouvrira les portes d'un final concluant et bien amené à défaut de franchement surprendre.


Malheureusement, je n'ai donc pas vu le chef-d'œuvre plus ou moins négligé par la postérité que j'espérais mais, s'éloigant des polars volubiles les plus populaires, Deray annonce de manière encore inaboutie l'avènement d'un style plus sec et plus âpre qui retentira quelques petites années plus tard avec entre autres Le Deuxième Souffle.

Sachenka
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le 30 oct. 2024

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