Trainsmissing
Putain, déjà 21 ans. 21 ans déjà que les junkies Renton, Spud, Sick Boy et le violent Begbie ont sillonné, Iggy Pop dans les oreilles, une Ecosse industrialisée à outrance par le biais d'un film...
Par
le 1 mars 2017
59 j'aime
6
Cela ne vous aura pas échappé, ces dernières années, on a pu assister au retour sur les écrans, petits ou grands, de la plupart des grosses licences cinématographiques qui ont marqué les 80s et 90 (voire même de certaines nettement plus anecdotiques). Devait bien arriver un moment où le phénomène devait toucher un autre pan du cinéma de ces années là, ces "petits" films cultes qui ont survécu à l’épreuve du temps en marquant au fer rouge toute une génération de cinéphiles.
C’est donc Trainspotting qui fête son grand retour, toujours réalisé par Danny Boyle et avec le retour de la bande au complet. Offrir une suite à une telle œuvre, le pari est risqué puisqu’il s’agit d’un film tout ce qu’il y a de plus auto-contenu, qui n’appelait aucune suite. Mais voilà Trainspotting c’est une galerie de personnages franchement savoureux que l’on a, au fond, quand même envie de revoir, rien que pour savoir ce qu’ils sont devenus. Irvine Welsh ne s’y était pas trompé et avait lui-même déjà offert une suite à son roman dont ce T2 n'est justement pas l'adaptation.
Premier constat par rapport aux personnages, ils sont tous quasiment là où on les a laissé il y a 20 ans (même Mark qui semble au départ avoir bien vécu et évolué revient à son point de départ). On pourrait se réjouir de ces retrouvailles, a priori assez authentiques du coup, mais il y a déjà là à mon sens un immense problème. Oui le film d’origine traitait de la lassitude et du marasme de cette jeunesse incapable d’avancer et coincée dans une Ecosse sinistrée : l’idée de stagnation y était certes omniprésente mais finalement dépassée par le refus de la fatalité et du déterminisme. Cette note d’espoir s’accompagnait d’un coût très lourd, fait de trahison, mais voilà : le champ des possibles semblait s’ouvrir pour ces personnages, y compris les "lésés" de cette cruelle conclusion.
Cette idée de stagnation, en plus d’être assez décevante et paresseuse en termes d’écriture, n’est même pas à mon sens dans la réelle continuité du propos du premier film. Passer de jeunes sans perspectives à des adultes sans vécu, c’est le faire sombrer dans ce déterminisme auquel, comme ses personnages, il cherchait désespérément à s’extraire.
Et c’est tout le film qui semble finalement contaminé par cette contradiction jusqu’à tourner à une sorte de nostalgie extrêmement mal placée, juste là pour convoquer l’esprit du 1er film. Malgré les conflits et rancœurs persistantes, les personnages semblent déterminés à retrouver le bon temps et l’insouciance de leur jeunesse faisant fi des traumas qu’ils ont vécus, ici à peine évoqués. Une amnésie sélective particulièrement embarrassante dans un film qui passe au final l’essentiel de ses 2 heures à citer voire glorifier Trainspotting dans un exercice de self celebration narcissique assez gênant. Les auto-citations et références sont innombrables (sérieux même les derniers Star Wars paraissent avoir la main légère à coté…) et ce jusqu’à l’absurde quand les scènes du 1er films rejoués 20 ans après par les acteurs sont déjà apparus à l’écran 10mn avant sous forme de flashbacks. Boyle s’obstine à faire appel à la nostalgie du spectateur mais ne lui fait même pas confiance pour repérer de lui-même des références pourtant extrêmement peu subtiles.
Le plus triste dans tout ça c’est qu’on pourrait passer outre tout ça si le film parvenait malgré tout à recréer la magie originelle mais non, même pas. On a beau assister à un espèce de remake légèrement méta et conscient de lui-même, jamais on a le sentiment de toucher du doigt l’esprit du Trainspotting de 1996. L’approche qui a si bien marché pour permettre la renaissance des grosses machines hollywoodiennes (certaines d’entre elles en tout cas) est ici un échec cuisant et pire, semble traduire une totale incompréhension du succès de son film par son auteur. Là où un Star Wars, un Jurassic Park ou un Mad Max, de par leur caractère universel, intemporel et quasi-mythologique peuvent subir à merveille l’épreuve de la répétition et de l’actualisation, Trainspotting est lui, au contraire, un film générationnel dont le sens et l'essence restent indissociables du contexte de sa création.
C’est dommage, parce que Danny Boyle, quand il arrête de recycler les mêmes effets et idées de mise en scène qu’il y’a 20 ans, arrive largement à proposer des choses un peu innovantes et intéressantes. Les acteurs eux semblent hyper contents de retrouver les personnages qui ont lancé leurs carrières. Alors nous en tant que spectateurs, on est ravis de leurs retrouvailles y'a pas de soucis, mais bon... Peut-être auraient-elles davantage eu leur place devant des pintes de McEwans dans un pub d’Edimbourg que devant les caméras de plateaux de cinéma.
Créée
le 19 mars 2017
Critique lue 403 fois
3 j'aime
D'autres avis sur T2 Trainspotting
Putain, déjà 21 ans. 21 ans déjà que les junkies Renton, Spud, Sick Boy et le violent Begbie ont sillonné, Iggy Pop dans les oreilles, une Ecosse industrialisée à outrance par le biais d'un film...
Par
le 1 mars 2017
59 j'aime
6
Si Danny Boyle est ce qu'il est aujourd'hui c'est en parti grâce à Trainspotting, son deuxième film. Sorti en 1996, celui-ci connu un succès auprès des critiques et des spectateurs au point d'en...
Par
le 7 mars 2017
52 j'aime
1996 – Trainspotting sort sur les écrans et c’est un choc. Une claque qui résonne comme une révolution par son irrévérence, son culot, sa façon d’aborder la violence et la misère sociale...
le 16 févr. 2017
46 j'aime
1
Du même critique
Qu’est-ce que le cinema ? Question extrêmement pompeuse pour ouvrir ce papier mais qui se pose plus que jamais devant un film tel que celui-ci. Même si ce nouvel Avengers est globalement une fois...
le 27 avr. 2018
6 j'aime
4
Ce n'est plus un secret, le principal reproche adressé au The Force Awakens de JJ Abrams était son manque d’audace. Un retour de la magie star wars originelle un peu miraculeux qu’il n’est pas...
le 14 déc. 2017
4 j'aime
Cela ne vous aura pas échappé, ces dernières années, on a pu assister au retour sur les écrans, petits ou grands, de la plupart des grosses licences cinématographiques qui ont marqué les 80s et 90...
le 19 mars 2017
3 j'aime