L'agrément de la raison par l'adhésion du coeur



  • Tarzan, que fais-tu ? Un bébé ! Où l'as-tu trouvé ?

  • Cheeta a trouvé.

  • Un bébé perdu dans la jungle ? Ses parents doivent être affolés! Allons, du calme.

  • Jane s'occupe de toi.

  • Jane le veut ?

  • Si je le veux ?



Le cinéaste Richard Thorpe à qui l'on doit le décevant troisième opus de la franchise "Tarzan s'évade" revient pour une quatrième aventure avec "Tarzan trouve un fils". En voyant que Thorpe était de retour en tant que réalisateur je me suis fortement inquiété sur ce que donnerait le rendu final de cette oeuvre. Heureusement, Tarzan trouve un fils ne sera pas une reproduction des erreurs vus dans le film d'avant qui abusait et sans le moindre scrupule en resservant de nombreuses séquences directement coupé sur les longs-métrages déjà sortis. On aura tout de même droit à une réutilisation minimaliste de scènes qui en comparaison de "Tarzan s'évade" reste parfaitement minimaliste et digeste. Deux petites séquences qui se fondent parfaitement dans de nombreuses nouvelles images qui font plaisir à voir à travers un scénario qui n'oublie pas les opus d'avant en faisant des références à Harry Holt, le cimetière des éléphants, ou encore l'ascension périlleuse des falaises du Mutia sacrée.


Le film s'ouvre sur un avion qui survole l'Afrique avec à son bord Richard Lancing sa femme ainsi qu'un nourrisson qui n'est autre que leur fils. Suite à un défaut technique l'appareil s'écrase laissant tous les passagers à bord morts, sauf le bébé qui sera adopté par Tarzan et Jane. Une histoire intéressante faisant écho à celle de Tarzan qui néanmoins me laisse songeur sur certains éléments de l'intrigue puisqu'un safari sera cinq ans plus tard mis en place afin de retrouver la famille disparue qui a hérité de la fortune de Greystoke. L'enfant en tant qu'unique survivant devient l'héritier direct. Dans le récit original d'Edgar Rice Burroughs, c'est Tarzan qui est l'héritier de la fortune de Greystoke, du coup je me demande pourquoi un tel changement fut opéré. Un simple clin d'oeil au roman ? Une manière audacieuse de présenter le jeune garçon comme étant finalement le véritable Tarzan des romans de Burroughs ? Tarzan est-il quand même dans cette saga un héritier de Greystoke au même titre que son fils adoptif ce qui ferait qu'ils seraient liés par le sang ? Beaucoup de questions mais à ce jour aucune réponse.


Tarzan trouve un fils est une suite logique à "Tarzan l'homme-singe" de W. S. Van Dyke, qui présente le mythe de Tarzan et sa rencontre avec Jane, ainsi que de "Tarzan et sa compagne" réalisé par Cedric Gibbons et Jack Conway, qui explore l'assimilation de Jane au sein de la nature sauvage et sa relation avec Tarzan, aussi à "Tarzan s'évade" qui malgré son aspect fauché présente la vie de couple des amoureux qui ont construit un foyer dans les arbres. La suite évidente ne pouvait être que la venue d'un bébé au sein du couple, une idée brillante que l'on doit au scénariste Cyril Hume qui en faisant cette proposition permet d'être dans une évolution constante avec les personnages qui ne sont jamais dans la répétition. La vie de famille est ici superbement dépeinte avec un Tarzan qui si au début n'est pas très enchantée à l'arrivée d'un bébé dans le cocon amoureux qu'il a construit avec Jane, s'avèrera 5 ans après être un père formidable prenant parfaitement soin de son fils. Une paix familiale idyllique qui sera perturbé à l'arrivée du safari commandé par Sir Thomas Lancing, Mr Austin Lancing, Mme Lancing et le guide Mr Sande qui veulent ramener l'enfant en Angleterre soi-disant pour le bien-être de celui-ci qui grandit dans un univers trop dangereux alors que c'est en fait seulement par opportunisme afin de réclamer l'héritage.



Pardon. Je sais que tu ne me pardonneras jamais. Mais je reviendrai et si tu veux, tu pourras me chasser.



Tarzan refuse catégoriquement de rendre son fils qu'il considère comme sa chair, allant jusqu'à être menaçant et violent avec le safari. Seulement, Jane suite à divers incidents par le biais desquels son fils est passé près de la mort (attaquer par un rhinocéros en furie, capturer dans une toile géante avec des araignées affamées, emporter dans un précipice....) sauver in extremis à chaque fois par Tarzan craint qu'un jour l'homme-singe ne puisse arriver à temps pour le protéger. Elle en déduit avec énormément de peine et de courage que laisser partir son fils avec sa véritable famille serait dans son intérêt le mieux à faire. Une approche intelligente qui va confronter Jane à Tarzan dans une première querelle amoureuse où elle en arrivera à piéger son compagnon. Une amorce dramatique très forte alimentée par une inquiétude constante puisqu'on ne cesse de se demander si l'enfant partira finalement en Angleterre (bien entendu pas avec les antagonistes, mais avec le seul membre de la famille qui se soucie honnêtement de l'enfant : "Sir Thomas Lancing"), ou s'il va finalement rester en Afrique auprès de ses parents adoptifs.


Johnny Weissmuller, le champion de natation en tant que Tarzan prouve qu'il est totalement à l'aise dans ce rôle. La magnifique Maureen O'sullivan marque une fois encore par sa présence, bien que je regrette qu'elle soit plus vêtue qu'à l'habitude à cause de l'application de la censure du code de production Hays. Étant en enceinte durant le tournage censure ou non il y avait peu de chances de la voir en tenue légère. J'ai été tout du long perturbé par les sandales que porte Jane et qui ne colle pas du tout avec sa vie sauvage, sachant que dans les films d'avant elle est pied nues. Le couple est ici présenté dans une conduite moins sulfureuse puisqu'on y découvre non plus la vie de jeunes couples avec les frivolités qui vont avec, mais celle de parent responsable qui induit automatiquement une maturité supplémentaire qui conduira à plus de sensibilités et de tristesses due à la trahison de Jane. Une saga qui enchaîne les bonnes idées autour du couple auquel on croit totalement. "Boy" (Johnny Sheffield), nommé ainsi par Tarzan à la demande de Jane est un enfant espiègle, taquin et survolté qui amène du dynamisme à l'intrigue. Les antagonistes incarnés par Ian Hunter pour Mr Austin Lancing, Frieda Inescort pour sa femme Mme Lancing et Henry Wilcoxon pour le guide Mr Sande sont totalement oubliables. Seul Henry Stephenson alias Sir Thomas Lancing sans sort bien avec son rôle posé et attendrissant.


Techniquement, si on tient compte de l'époque de sortie le film est plutôt bien fichu avec une utilisation moins importante d'animaux sauvages au premier plan bien qu'ils restent tout du long présent. La composition musicale de William Axt est oubliable, si bien qu'à l'heure où j'écris la critique de ce film, que j'ai vu il y a seulement deux heures, je l'ai déjà oublié. L'action bas son plein à travers des péripéties que l'on a globalement déjà pu voir mais qui sont cette fois vécu par Boy ce qui représente une menace bien plus perceptible de par son jeune âge que pour Tarzan. On retrouve le fameux ballet aquatique qui symbolise magnifiquement chaque film de la saga. A ceci près, qu'il ne s'agit plus d'une chorégraphie érotique/amoureuse entre Jane et Tarzan mais d'un jeu de cache-cache sous-marin entre Boy et son père. Enfin je terminerai par la séquence finale dans laquelle Jane est gravement blessée par une lance en voulant aider son fils à fuir. Sur le moment j'ai vraiment cru qu'elle allait mourir dans les bras de Tarzan, je vous raconte pas le stress que j'ai subi, mais elle va finalement sans sortir et Tarzan lui pardonnera, tout va bien dans le meilleur des mondes. Initialement, dans le script original Jane devait bel et bien mourir, mais de peur d'avoir un retour négatif autour d'un tel choix le cinéaste reviendra sur cette idée. J'adore Maureen O'sullivan en tant que Jane, mais je dois reconnaître que si son personnage aurait péri comme prévu, j'aurai sans doute accordé à ce film une note parfaite.


CONCLUSION :


En réalisant Tarzan trouve un fils, Richard Thorpe se rattrape admirablement de la débâcle que fut sa réalisation autour de Tarzan s'évade en proposant une oeuvre certes imparfaite, mais qui conduit logiquement un récit qui fait superbement suite aux trois opus d'avant par le biais d'une intrigue savamment dramatique qui explore des éléments nouveaux qui apportent bien plus de nuances et de sensibilités. Un film qui m'a touché, fait réfléchir, mis sous tension et fait rire, sous une conjoncture dramatique où les sentiments l'emportent sur la raison.


Une saga qui trouve un second souffle tout à fait appréciable.




  • Jane!

  • Qu'y a-t-il ? Il te reconnaît! Il te sourit.

  • Bébé il tient.

  • C'est bien, tiens-le!

  • Bébé est fort!

  • Tarzan il est ici depuis une semaine. Il faut lui donner un nom.

  • On l'appelle ?

  • Oui, comme Tarzan, Jane, Cheeta... Bébé doit avoir un nom.

  • Bébé fort. Je l'appelle "Elephant"!

  • Ah! ah! ah! "Elephant", avec ce tout petit nez ?

  • Plus tard "Elephant". Maintenant "Boy".


B_Jérémy
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le 13 juin 2021

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