Tatouage par Pascoul Relléguic

Une riche fille de commerçant prend la fuite avec son petit commis d'amant. Mais elle se retrouve vendue à un pimp de geishas puis tatouée d'une araignée qui symbolisera son pouvoir destructeur sur les hommes. L'amour survivra-t-il à la vengeance ? Tatouage est un drame romantique tourné en 1966 par Yasuzō Masumura et qui est récemment ressorti sur nos écrans dans une version restaurée de toute beauté : la qualité d'époque de la réalisation et de la photographie profite pleinement de ce nouvel écrin qui donne au film un caractère quasi-contemporain.

Le style cinématographique demeure, lui, de son temps, avec un classicisme un brin désuet, voire parfois un peu ennuyant. Mais si l'on dépasse ces scories (dont des scènes de pugilat volontairement brouillonnes), Tatouage réserve de belles surprises, que ce soit sur le plan formel comme dit précédemment ou sur son récit. Beaucoup de bonnes idées parsèment le métrage : le tatoueur qui hante l'arrière-plan en témoin maudit des conséquences mortifères de son œuvre ; l'ambiguïté de l'émancipation de cette jeune femme affirmée, tant victime des violences masculines qu'auteure égoïste d'exactions et de manipulations (on ne peut pas dire qu'elle éveille le meilleur chez ses partenaires) ; le doute planant, quasi-fantastique, du rôle du tatouage dans sa transformation/révélation ; la fascination toute japonaise pour la mort et l'érotisation des étoffes (pour amateurs de bruitages de obi dénoués)...

Et si le film ne verse pas dans les excès gores de la décennie suivante, il n'hésite pas pour autant à rougir généreusement les mains des assassins. Et quel magnifique plan final, parfaite conclusion de la poésie morbide et désespérée qui traverse Tatouage. On retiendra également l'excellente prestation de Ayako Wakao dans le rôle principal.