L'Intelligence Artificielle arrive, elle est déjà là dans l'industrie, elle va changer fondamentalement notre existence, nous supplanter sur la Planète, elle ne signifie ni plus ni moins que la fin de l'humanité d'après certains des plus brillants penseurs contemporains. Le sujet de "l'AI" agite logiquement le petit monde de la littérature de SF depuis toujours, et a peu à peu donné lieu à quelques films notables sur (ou autour) du sujet, de, bien entendu, "2001" au plus récent, et fort réussi, "Ex-Machina". Il était donc logique que Netflix se penche sur le sujet, avec le manque de délicatesse, et aussi d'intelligence, artificielle ou non, qui caractérise ses productions : sans surprise, "Tau" ne nous offrira rien qui fasse avancer le sujet, recyclant sans conviction dans un scénario bringuebalant, ni totalement risible ni vraiment convaincant, tous les thèmes qui ont déjà été inventés, et ne proposant rien de nouveau. C'est ici l'AI (la voix de Gary Oldman, qui ne se foule pas...) qui est le refuge du reste "d'humanité" que son créateur, savant fou caricatural (Ed Skrein, comme toujours incompétent), a jeté par dessus bord avec son éthique et sa compassion sacrifiées à la réussite de son business. Le film, après une première demi-heure expédiée envers et contre tout bon sens, se concentre sur une amitié naissante entre une prisonnière au QI pour le moins variable et son geôlier-AI tout disposé à négocier sa liberté contre un minimum d'informations pertinentes. Ce face à face pourrait être passionnant s'il n'était pas qu'effleuré, comme à peu près tout dans ce film qui, à force de vouloir aller vite pour le pas ennuyer son public à l'attention volatile, ne traite rien convenablement. Et nous laisse avec une impression de vide, sur un happy end illogique. On notera aussi que, bien entendu, le "génie du Mal" de service ici est un homme raffiné amateur d'Art, de haute gastronomie et de vin français, tandis que la bonne héroïne américaine n'a jamais rien lu de sa vie, et demande à corps et cris hamburgers et poulet. On a les messages qu'on mérite.
[Critique écrite en 2018]