C'est l'histoire d'un homme de 26 ans, qui vit sa vie au fil du rasoir.
D'abord lentement manié, ce rasoir entaille davantage et davantage son cuir d'affutage qui, jadis, épousait son mouvement.
Ce cuir devient maintenant lamelles, entailles et séquelles.
Frénétiquement, il gratte et se transfigure : il se vomit mais plonge toute bière médicamentée et tout iroquois insolent dans son abysse : là où il habite, au plein milieu d'un trou, sa contingence, pulsion / action - mort.
Au milieu Betsy. Betsy...Betsy.
Démon, démon de cité, l'homme seul de Dieu.
Après ça, chute puis renaissance.
Maladroite, gauche, mais sur quatre roues en nuit-lampadaire.
Tout comme avant, la digestion de ces gravats et rixes interlopes en plus.
Juste ça. Un pied sur un corps désarticulé et une piètre tentative de suicide devant un canapé qui sert de pause avant l'endormissement.
Une enfant volée pantoise, plus heureuse que lui, plus libre aussi.
La scène du petit-déjeuner l'indiquera toujours : les yeux de l'enfance sont les bons.
Ce film reste à ce jour mon plus gros choc cinématographique, et je ne sais pas en parler.
Je ne sais qu'en dire, par-delà les images et les rues new-yorkaises sales et foisonnantes, je ne retiens qu'un homme. Celui à l'écran bien sûr, avec lequel j'ai longtemps cru faire corps avant de lâchement, mais progressivement, avec ce qu'il faut de pudeur, le laisser à lui si tristement seul - décidément -, dans son taxi.
Ce sont les séquelles de l'homme seul.
Le Viol par l'image.
Ce sont les séquelles de l'homme seul.
J'ai vu du rouge, un homme avec un casque moderne sur les oreilles lors que je marchais et j'ai aperçu Scorsese, T-Shirt noir et coude sur genou, attendant Miss Betsy s'effaçant pareille à toutes les femmes : belles et fugaces. À toutes les femmes qu'on accroche du regard pour les aimer puis les bien voir s'enfuir.
Plus tard j'ai aussi vu Paul Schrader, après le film puis pendant le film, même dedans le film, à travers le film, oui, à travers le film.
J'ai vu ces trois gentilshommes sourirent de ce qu'ils tournaient tous, entre eux entre hommes.
Et d'entre toutes ces lignes j'ai voulu faire le malin, pour me cacher de moi-même et du monstre froid mais mélodieux de la mélancolie, celle qu'on ressent tous ; pour moi c'est l'Attrape-coeurs et puis Satie.
C'est terminé.
Chaque fois que je voudrai me cacher, l'expiation de Travis viendra m'épauler.
C'est ça que je vais garder ; non pas que je garde, mais que je vais garder : car ce mouvement, ses insomnies, mes fragments d'âme qui se sont colorisés au fil de la pellicule (très snob « pellicule », hm...), tout ça ce n'est rien. Rien qu'un passage, juste une phase.
Alors à ma vie je dédie mon maigre ouvrage, qui vaut ce qu'il vaut mais auprès duquel fièrement me tiens-je. Comme un homme.
-
Arraché par tous les bouts
Oui mais D'un seul tenant
Vivant comme un homme
Amoureux comme un homme
Tempête Bravant comme un homme
J'ai pleuré avant le voyage
Seul à salle
Mais tout ça n'a jamais été mon nom
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Je voulais juste dormir
Me soulager de mes serpents
Les éteindre doucement
Encore une fois
Retenter
Mais tout ça n'est plus important
Car j'ai
-
.
..
Dépassé.