De ce que je m'en souviens, il s'agit du film qui a véritablement lancé ma passion pour le cinéma, mon attirance pour les films de Martin Scorsese, et mon adoration pour ce génie qu'est Robert De Niro. Beaucoup de choses ont été dites sur Taxi Driver, et donc je vais me contenter d'essayer d'illustrer ma relation à celui-ci.
Taxi Driver c'est avant tout une certaine fascination pour le vice, pour cet homme en chute libre qu'on ne peut s'empêcher de regarder. Tout dans ce film est noir, sombre, corrompu. New York, le petit jardin de Scorsese, est montré ici comme un enfer sur terre, avec ses putes, ses drogués, ses tueurs, ses criminels... Notre "héros", Travis Bickle, revient du Vietnam avec les honneurs, mais sans plus aucun code social. S'il parvient initialement à séduire la jeune Betsy par sa différence, elle comprends vite qu'il est bien trop marginal pour elle. C'est parfaitement illustré dans la scène où Travis appelle Betsy pour s'excuser suite à leur séance de cinéma, où la caméra, gênée comme le spectateur, ne peut plus regarder Travis et préfère s'orienter vers la porte. La dernière lueur d'espoir que représentait Betsy est éteinte, et le personnage interprété par De Niro sombre dans la folie.
L'une des forces du film, c'est de ne pas céder à la facilité avec les flashbacks de guerre, ainsi les traumatismes de Travis restent enfouis, jamais montrés ni évoqués. On comprends toutefois vite que la guerre n'a laissé de lui qu'une coquille vide, un être qui n'est plus vraiment vivant mais dont l'instinct tueur est toujours là. Dans son meilleur caméo, Scorsese lui-même va rallumer cette flamme dans la scène mémorable du "Magnum 44". Quand j'étais plus jeune, j'étais fasciné par ce côté "badass" qu'acquiert soudainement Travis, qui se mets à entrainer rigoureusement son corps et s'arme de nombreux pistolets. Maintenant je vois le danger d'interpréter ce personnage de la mauvaise façon, et je vois que j'étais moi même tombé dans le piège tendu par l'auteur Paul Schrader, en idolâtrant un criminel.
Et pourtant je ne mets "que" 9, principalement à cause des quelques défauts techniques du film (les cheveux de De Niro qui changent à chaque scène, le thème musical du film beaucoup trop recyclé...) mais aussi pour la fin qui continue de m'échapper. Elle peut être interprétée de deux manières selon moi, mais aucune des deux ne me parait complétement juste, la fin ressemble presque à un rêve, qui détone comparé à toute la réalité qui a précédé.