La séquence d’ouverture se déroule sur un bateau de pêche, chevauchant des murs d’eau. En son sein, deux hommes, deux pêcheurs vêtus d’un ciré jaune, s’occupent du poisson, couteau en main, essuyant du même coup une tempête qui fait rage jusque dans leur cabine. A la fois tout est dit, pourtant cette introduction n’est qu’un leurre puisqu’on ne reverra quasi plus le bateau. Le film va mettre en scène une autre tempête, familiale, entre un père divorcé et ses deux enfants, dont il n’a bientôt plus la charge, sauf s’il abandonne le grand métier – Une expression qui évoque ceux qui partent quinze jours en mer et reviennent durant les deux jours de forte marée. C’est le monde des marins qui entre en collision avec celui des terriens. Le film caresse donc une intimité fragile, notamment lorsque la fille de Dom – le pêcheur – est enceinte et qu’il sera absent au moment où son rôle de père est fortement réclamé ou dans sa relation trop amical avec son fils, qui finira par rejoindre sa mère pour bifurquer de l’avenir marin qui lui était promis. C’est le contexte social qui s’avère ici le plus cruel, dès l’instant que Dom choisit d’abandonner le métier de sa vie pour s’acheter un bateau à lui et qu’il se heurte violemment à une crise des pêcheurs relayée par des banquiers voraces et des armateurs peu dociles. L’originalité du film de Samuel Collardey est d’offrir ses rôles à des acteurs amateurs puisqu’il s’agit de la véritable histoire de Dominique Leborne et ses enfants, jouée entièrement par eux. Le film n’est pas exempt de défauts, les mêmes que l’on pouvait trouver dans L’apprenti, le premier film de Samuel Collardey mais la cruauté, l’humanité et la vérité documentaire qui s’en dégage emmènent parfois le film vers des instants de grâce – Un café entre Dom et sa (propre) maman ; Un moment d’aveu/réconciliation entre Dom et sa fille. Sans compter que leur présence est essentielle pour ne pas dire exceptionnelle – Vibrant et inoubliable Dominique Leborne, vraiment.